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Les Épingles tout frais forgées ainsi que les À lire sur Internet tout frais repérés sont en haut de la pile
En épingle en 2015
L'insecte ou l'événement entomologique du jour, celui qui défraye la chronique et qui alimente les conversations en ville et dans les insectariums, sera épinglé sur cette page, qui s'enrichira au fur et à mesure des événements entomologiques.

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Rédaction (sauf mention contraire) : Alain Fraval 

La dernière de 2014 : Épatante et éclectique Hépatique            Les Épingles d'avant

Les Épingles parues dans le n° 175 d'Insectes : Entomophagie prophylactique, Cette très chère drosophile. Du 173 : Très très haut de gamme.

Chasseuses de têtes, Les soldats ont le cerveau plus petit, À la sortie des urnes..., Souriez, vous êtes filmés, L’ours, la fourmi et la cicadelle, Dopage, Hexaplégie réversible, Les esclaves se rebiffent, Sur la piste des fourmis, Petit coin, La cigale muette qui chante, Faux souvenirs, À hue et à dia, S’envoyer en l’air…, Prompt rétablissement, Essais en vol de l'Ax3, Familles nombreuses comme avant, Vert luisant, Au jardin, Myrmécologie spatiale, Recherche horizontale,
Les Épingles parues dans le n° 176 d'Insectes : Chasseurs à réaction, pas seulement, Dédoublement, Troublantes queues.

Œil pour œil, Bourrés, et pourtant..., L'avantage de la couleur métallisée, Pauvreté partagée, L'odeur du mâle, Brouillage génital, La taille importe, Trouillométrie, Attrape-mouche 2.0Il y a beaucoup  moins d'insectes, Centre d’information et d’orientation, La génération du changement, Surveillance par drones,
Parues dans Insectes n° 177 : Ça se complique, Plus noire est la nuit..., La rigidité augmente avec l'âge.
Moustiques anti-moustiques,
Tout le monde en cœur, jusqu'à la fin, L'alcool pour survivre au froid, Cruciverbisme chez la Punaise soldat, Droguées et asservies, Quand la diversité naît de l'adversité, Pas d'acide pour la reine, Punaise lapin-lion, La Balanine est l'avenir du Balanin, Le virus de la fourmi planétaire, Stridulomètre, Pretium doloris, Les bons parents font les bons enfants, polyéthylènophagie,
Parues dans Insectes n° 178 : Il prend les chenilles pour des champignons, Bourdons cargos, Soucoupes rampantes, Plus de charme, moins d'asticots,
Insecticule, Seules les mères..., Au bon coin, Pas si bêtes, Comme un seul homme, Du formol dans l'œil, Le coup de patte en plus, Nombreux articles, e-mobile

Pourquoi sauter ?,

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Décembre À cliquer
 
1071
Pourquoi sauter ?
C’est très connu, les pois sauteurs sautent pour amuser les enfants. En fait, la chenille du Carpocapse des Euphorbiacées, Laspeyresia saltitans (Lép. Érébidé), en se détendant brusquement à l’intérieur du pois, cherche à se mettre à l’ombre. Une ombre propice à la suite de son développement. D’autres Lépidoptères, Coléoptères et Hyménoptères phytophages endophytes, inclus dans des boutons floraux, des graines ou des galles font de même. C’est une spécialité rare (voir ici  et là).
Bathyplectes anurus (Hym. Ichneumonidé), bien connu auxiliaire de lutte biologique contre le Phytonome de la luzerne Hypera  postica (Col. Curculionidé), saute de même, enfermé lui dans son cocon de nymphose. Sa larve se développe en dévorant petit à petit l’intérieur de celle du Phytonome ; une fois que celle-ci a fini de tisser son cocon de nymphose, elle quitte son hôte et tisse son propre cocon, en forme de ballon de rugby, avec une bande surélevée au milieu. Ce cocon roule par terre et se déplace, par bonds de 5 cm en moyenne.
À l’université Kyushu (Japon), Yoriko Saeki et son équipe ont soumis des lots de 100 B. anurus à diverses intensités lumineuses, températures et niveaux d’hygrométrie au laboratoire.
Un air sec comme une brusque augmentation de température favorisent les sauts, ainsi que la lumière (3 fois plus de bonds). Placés sur une surface avec un gradient ombre/lumière, les cocons pour la plupart se retrouvent à l’ombre. La proximité de leur prédateur, une grosse fourmi, les incite à sauter mais, une fois le contact établi, la fréquence des sauts diminue.
Sauter sert à se placer dans un endroit favorable (comme chez les sauteurs phytophages ci-dessus). Mais sauter coûte. Les individus sauteurs sont plus maigres que ceux qui ne bougent pas.
D’après « Cocooned wasp larvae jump to shaded areas to improve their survival ». Lu le 21 décembre à //phys.org/news/


1070 e-mobile
Ave e- pour entomo.
Ce sera dans les hottes des pères Noël : le bugracercar, pour les 6 ans et plus. Le constructeur Mattel ose un nouveau concept d’automobile, taille et usage petite bagnole, en plastoc. 4 roues, des yeux, des antennes en guise de pare-chocs, des ailes transparentes (c’est un diptère). L’abdomen s’ouvre à son extrémité distale par un gros trou où l’on est convié à enfiler un compartiment transparent muni d’un bouchon vert.
Le dit bouchon sert, nous indique le mode d’emploi, à bloquer dans le coin d’une cuvette un grillon et à le transférer dans le compartiment (qui peut contenir jusqu’à 5 individus) en compagnie de quelques rondelles de légumes. Une fois là, le grillon va vers l’avant, dans le cockpit et prend en charge la conduite de l’engin (qui peut rouler sans ou faire de la musique).
Ses mouvements (ses chocs contre les côtés de sa cabine) orientent en effet les roues avant. La petite bagnole à propulsion électrique (ce n’est pas l’insecte qui pédale) zizague. Il est prévu qu’une faute de notre grillon précipite le bugracercar contre une plinthe : le truc repart alors en arrière.
Trente-cinq dollars, dans tous les bons magasins, grillon(s) en sus.
Le site bugracercar

Quand les insectes se passent de piles pour courir : Formule i, Épingle de 2013  

 1069 Nombreux articles
Ce qualificatif convient à l’antenne des sauterelles et, de mieux en mieux, à la production écrite des entomologistes. Thomas Chouvenc et Nan-Yao Su, spécialistes des termites oeuvrant à l’université de Floride (États-Unis) ont quantifié leur logorrhée et mis en évidence son évolution, grand taxon par grand taxon, depuis 60 ans. Leur source : Google scholar.
C’est durant la dernière décennie surtout que les publications se sont multipliées ; parallèlement elles sont devenues plus accessibles.
Soit l’exemple du myrmécologue lisant tout ce qui paraît sur les fourmis. En 1959, la bibliothécaire de la station lui procure 1,5 articles par semaine. En 1974, c’est 5,2. En 2015 (la bibliothécaire a disparu depuis longtemps), il doit en absorber une petite quarantaine.
Les entomologistes férus d’autres groupes ont vu le volume de leur « biblio » augmenter pareillement tout en restant moitié moins (en gros) inférieur à ce record. À noter la très récente envolée du nombre des articles consacrés à la Punaise des lits.
Autre changement : de plus en plus, les auteurs se mettent à plusieurs pour mener une recherche (ou tout au moins pour signer le papier).
La liste des références bibliographiques en bas d’article enfle. Pourtant, les trois quarts des publications ne sont jamais citées plus d’une fois (ce qui n’est pas propre à l’entomologie).
Question pour le chercheur : comment avaler et surtout digérer tant de matière ?
Article source (gratuit, en anglais) : DOI: http://dx.doi.org/10.1093/ae/tmv067

1068 Le coup de patte en plus
Dans la gent fourmi, composée de 326 genres, la capacité de sauter est rare. 3 genres utilisent leur pattes, 3 autres leurs mandibules, dont tous les Odontomachus (Hym. Ponérinées). 
Magdalena Sorger, de l’université de la Caroline du Nord (États-Unis), a regardé de près O. rixosus. Et découvert qu’il saute aussi avec ses pattes.
Cette fourmi a 3 façons de sauter. La première consiste à ouvrir brusquement ses mandibules (système de détente) posées sur le sol : elle atterrit n’importe où, souvent sur le dos. La seconde voit les mandibules s’appuyer sur un objet vertical : le « vol » est tout autant hasardeux. Enfin, et c’est son originalité, elle se propulse sur ses pattes : le trajet a l’air calculé et la réception plus maîtrisée.
Le saut mandibulaire répond à une menace imminente. De nouvelles observations sont nécessaires pour déterminer si le saut crural peut être dirigé vers une proie.
D’après « Trap-jaw ants exhibit previously unseen jumping behavior », lu le 1er décembre 2015 à //phys.org/news/
À (re)lire : Ils sautent, par Alain Fraval. Insectes n° 167 (2012-4).



En Malaisie, une ferme de mouches pour nourrir l’aquaculture,
par Bruno Philip. Le Monde, 21 décembre 2015.
[Hermétie brillante, Hermetia illucens (Dip. Stratiomyiidé]
NB : à "ferme de mouches" qui est un décalque de l'américain, on aurait préféré "verminerie".
À (re)lire : Hermetia illucens, mouche roborative, par Alain Fraval. Insectes  n° 173 (2013-3).

La vision chez les insectes (Partie 1) : Anatomie et structure des yeux composés, par Benoît Gilles. Passion entomologie, 16 décembre 2015.

La menace d’un prédateur subie à l’état de larve réduit la capacité du moustique à transmettre le paludisme. CNRS, 16 décembre 2015.
[Anopheles coluzzi, Dip. Culicidé / (Anisops jaczews, Hém. Notonectidé]
Novembre
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1067 Du formol dans l’œil
Oecophylla smaragdina (Hym. Formicidé) tisse des nids dans les arbres avec la soie des larves, en utilisant celles-ci comme navette. On trouve cette fourmi dans l’Est asiatique, en Indonésie et en Australie.
Phascolarctos cinereus, Mammifère marsupial, vit dans les eucalyptus de forêts humides le long de la côte orientale de l’Australie. C’est le koala, à l’allure de nounours. Il consomme les feuilles, à l’écart de la susdite fourmi, appelée là Fourmi verte.
Actuellement, la sécheresse règne sur la région et tout particulièrement sur l’île Magnétique, endroit touristique. Les koalas affamés se retrouvent dans les eucalyptus colonisés par la Fourmi verte et ça se passe mal pour eux. Les colonnes de fourmis parcourent leur fourrure sans dommage mais, arrivées à la tête, et traversant la cornée, la mordent, recourbent leur abdomen et déposent dans la plaie une goutte d’acide formique.
Un peu de larmes pour les fourmis (?) et la désolation pour les protecteurs des koalas qui les récupèrent errant sur les routes, aveugles.
D’après « Koalas suffering horrific injuries from swarms of green ants as drought forces them to migrate or starve », par Naomi Tsvirko. Lu le 23 novembre 2015 à www.dailymail.co.uk/news/
À (re)lire : À la recherche du Kroto…, par Nicolas Césard. Insectes n° 132 (2004-1).


1066 Comme un seul homme
On qualifie les colonies d’insectes eusociaux de superorganismes. Certaines sont en effet le niveau où s’exerce la sélection et l’existence de castes, aux capacités et aux tâches différentes, ce qui semble analogue à la spécialisation des cellules chez les métazoaires (et les plantes). Les fourmis, par exemple, réagissent collectivement en cas de danger, sous l’effet de composés volatiles émis par les individus attaqués, les phéromones d’alerte (recrutement de défenseurs) et de panique (tout le monde s’enfuit) ; la réponse de l’individu dépend de sa distance à l’émetteur.
Pourtant d’autres réponses bien adaptées existent, analogues à l’image de celle d’un Homo sapiens qui retire sa main ou s’en va selon le degré de la menace. Provoquées expérimentalement et observées par Thomas A. O’Shea-Wheller et ses collaborateurs (université de Bristol, Royaume-Uni), elles confortent la notion de superorganisme.
La fourmi choisie est Temnothorax albipennis (Hym. Myrmicinée), fourmi nomade logeant communément dans les fissures des roches et déménageant souvent. 30 colonies avec reine et ouvrières (de 12 à 268) sont installées au laboratoire dans des boîtes de Petri puis – c’est l’épreuve - dans des nids artificiels. Ceux-ci sont inclus dans un dispositif avec 2 autres nids distants, de qualités variées (plus ou moins sombres), buts de leur « émigration ».
Deux actions de « prédation » sur les colonies au départ : l’enlèvement d’éclaireuses ou celui d’ouvrières au milieu de la colonie, simulant respectivement la présence d’un prédateur à proximité du nid et son attaque au sein du nid. Dans le premier cas, la colonie se rétracte dans le nid, l’exploration et la découverte du meilleur nid prennent plus de temps. Dans le second cas, elle quitte celui-ci – elle émigre – et s’installe rapidement. Dans les deux cas, la colonie réagit au mieux.
Le mécanisme n’est pas clair. La reine joue un rôle tout à fait passif. Si une phéromone d’alarme est dispersée dans l’air, son action est le contraire de ce qu’elle est chez notamment une espèce très voisine où les ouvrières vont défendre la colonie. Le « système nerveux » des superorganismes que sont les colonies de T. albipennis reste à découvrir.
Article source (gratuit, en anglais)
À (re)lire, à propos de cette fourmi : Fourmi école  et La gauche attire les ouvrières.

1065 Pas si bêtes
La répartition inégalitaire des tâches entre les sexes est naturelle. Les femelles, ou ouvrières, construisent, défendent, approvisionnent, stockent, ventilent, réchauffent. Les mâles copulent.
Du coup, on a pensé que les premières avaient besoin et donc étaient dotées de capacités cognitives très supérieures à ce qui était dévolu aux seconds.
Stephan Wolf et Lars Chittka (Queen Mary University of London, Royaume-Uni) ont soumis mâles et femelles à des exercices de reconnaissance de fleurs artificielles de couleurs différentes et changeantes, récompense de miel à la clé.
Résultat : égalité parfaite des performances des uns et des autres. Les mâles, pas plus bêtes, sont des matériels de choix pour les études sur l’apprentissage, vu qu’ils ne piquent pas.
Travaux effectués sur le Bourdon terrestre Bombus terrestris (Hym. Apidé).
 Article source (gratuit, en anglais)


Néonicotinoïdes et abeilles : la désorientation des individus confirmée en plein champ, la colonie adapte sa stratégie.
INRA, 21 novembre 2011.

Les mouches Diopsidae : des yeux loin perchés !,
par Benoît Gilles. Passion entomologie, 18 novembre 2015.

L’araignée mâle, un très mauvais coup
, | Par Nathaniel Herzberg. Le Monde, 16 novembre 2015.
[Larinia jeskovi]

Maladie de chagas : Décryptage du génome de la punaise hématophage Rhodnius prolixus. Caducee.net, 16 novembre 2015.
Octobre
À cliquer

1064 Au bon coin
Les imagos mâles de la Mouche du vinaigre marquent les endroits propices aux rencontres, à un bon repas et à la production de futurs asticots. Ceci avec un parfum phéromonal.
C’est ce qu’on découvert les chercheurs de l’université de médecine John Hopkins (à Baltimore, États-Unis) à la suite de l’observation due à Chun-Chieh Lin, thésard au labo, qui testait une nouvelle forme de boîte de Petri. Un joli cas de sérendipité.
Soit donc une boîte d’observation constituée de deux plaques de verre séparées par une paroi verticale en forme de carré aux coins étirés et aux côtés concaves. Elle est plongée dans le noir, éclairée en infra-rouge ; une caméra enregistre les allées et venues des mouches encagées. Une bouffée d’odeur de vinaigre de cidre fait se rassembler les drosophiles dans le coin parfumé. Puis une bouffée d’air frais. Les mouches continuent à fréquenter le même coin. Elles ont donc déposé une marque chimique (phéromone), rapidement, ce qui n’était pas connu.
S’en sont suivies plusieurs manips pour recenser les odeurs actives – à part le vinaigre de cidre, seulement la banane et la levure -, montrer que seuls les mâles déposent la marque, et qu’elle est perçue par l’odorat – 20 neurones chemorécepteurs dans les sensilles basiconiques de l’antenne – et non par le goût, ceci en mettant en piste des drosos mutantes anosmiques ou agueusiques. La phéromone, soluble dans l’hexane, a été identifiée au 9-tricosène, un hydrocarbure cuticulaire des mâles. En étalant une couche de gel au fond de la boîte, il a été constaté que les mouches y pondaient : cette phéromone provoque le rassemblement et la ponte. Elle marque le bon coin, bon pour se restaurer, se rencontrer et copuler, bon pour les asticots à venir.
En est-il de même chez les moustiques ? Ceci permettrait la mise au point de pièges.
D’après « Fruit fly pheromone flags great real estate for starting a family », lu le 12 octobre 2015 à //phys.org/news/
Article source (gratuit)
Image de la boîte à coins pointus
NDLR : le 9-tricosène est d’ores et déjà présent dans la glu de papiers tue-mouches.

1063 Seules les mères…
…s’occupent en fait des enfants. Alors qu’on voit des couples, en plus de mères célibataires, en élever. Et qu’il est désormais connu que les bons parents font les bons enfants (voir ci-dessous). En fait, les pères font largement semblant, mais assez bien pour avoir fait croire jusque-là qu’ils participaient autant que leur compagne et mère de leur progéniture aux soins aux jeunes. Une étude de leur transcriptome (de l'ensemble des ARN - messagers, ribosomiques, de transfert et autres espèces - issus de la transcription du génome) vient de les démasquer.
Chez le Nécrophore fossoyeur, Nicrophorus vespilloides, les deux sexes collaborent à la préparation de la pitance des larves, une boule façonnée à partir d’une charogne. Puis la femelle est fécondée. À ce stade, dans la moitié des cas, les mâles se carapatent, contre 5% des femelles qui abandonnent le nid. Puis la femelle pond. Puis les larves éclosent, qui seront élevées par leur mère seule, le couple ou le père seul. Des pourcentages établis à partir de l’observation de 269 couples encagés sur un terrain avec des sources de nourriture.
Il ressort premièrement de la manip que les individus se portent aussi bien et ont le même succès reproductif qu’ils aient bénéficié d’un ou deux parents durant leur stade larvaire.
Il ressort deuxièmement que certains gènes (notamment vitellogenin et takeout) s’expriment autant chez les femelles en couple, les femelles seules et les mâles célibataires.
Mais pas chez les mâles en couple. Voilà comment il appert qu’ils se la coulent douce.
Article source  
À (re)lire : Prendre soin des jeunes – partie 1 et partie 2 -, par Alain Fraval. Insectes n° 152 (2009-1) et 153 (2009-2).

1062 Insecticule
Étonnamment petit mais pas insignifiant. L’imago de Scydosella musawasensis (Col. Ptilidé) vient de repasser sous la toise (microscope électronique + logiciel ad hoc) : 325 µ. Cette mesure confirme qu’il détient le record de l’insecte libre (non parasitoïde) le plus petit. Il marche, il vole, on n’en sait pas plus sur sa vie.
D’après « Smallest Free-Living Insect Confirmed: Meet the Beetle », lu le 9 octobre 2015 à //news.discovery.com/
Image
À (re)lire, pour en savoir plus sur son anatomie notamment : Micro-insectes, par Alain Fraval. Insectes  n°176 (2015-1).  


Innovation : des fusils de paintball pour chasser la chenille processionnaire du pin, par Thibaut Lescuyer. Le Parisien, 28 octobre 2015.
[Thaumetopoea pityocampa, Lép. Érébidé]

Escovopsis
: Parasitisme chez les fourmis champignonnistes
, par Benoît Gilles. Passion Entomologie, 12 octobre 2015.

Un premier cas de « Xylella fastidiosa » dans les Alpes-Maritimes.
Le Monde, 8 octobre 2015.
Septembre
À cliquer

1061 Polyéthylènophagie
Une équipe sino-états-unienne a trouvé en la Pyrale (ou Teigne) des fruits secs Plodia interpunctella (Lép. Pyralidé) puis en le Ténébrion meunier Tenebrio molitor (Col. Ténébrionidé) des agents potentiels de dégradation de matières plastiques.
On sait les chenilles de cette pyrale capables de trouer les sacs plastiques et même les parois de récipients trop minces et l’on se méfie si jamais l’on en entreprend l’élevage.
En fait, elles sont, selon les expériences menées par cette équipe et publiées en 2014, capables de subsister longtemps sans dommage en n’ayant pour pitance que du polyéthylène. Mesure faite sur un lot de 100 chenilles, la consommation est de 34 to 39 milligrammes par tête. Et les crottes sont biodégradables.
Deux bactéries ont été isolées de leur tube digestif : Enterobacter asburiae YT1 et Bacillus sp. YP1. Placées en incubation sur un film de plastique pendant 28 jours, elles y ont creusé des cavités de jusqu’à 4 µm de profondeur. En suspension, elles ont dégradé environ 6 et 11% du poids du film plastique.
Quant au Ténébrion meunier, ses larves (« vers de farine ») nourries de cette seule matière pendant un mois se développent comme leurs consœurs alimentées classiquement de son de blé. L’examen chimique de leurs déjections montre que le carbone ingéré est d’une part minéralisé en gaz carbonique et d’autre part incorporé dans les lipides.
La gentamincine (un antibiotique) incorporée à l’aliment annihile la capacité « polystyrènophagique » des vers de farine en 10 jours. Comme bactérie endosymbiotique participant à la digestion du plastique, l’équipe a trouvé Exiguobacterium sp. YT2.
D’après notamment CNN et les résumés des articles sources (payants) : 2014 et 2015
Illustration : l’attaque d’un morceau de polystyrène par des vers de farine.
 
1060 Les bons parents font les bons enfants
C’est ce que dit le proverbe, qui vient de trouver une confirmation, en tous cas un exemple, chez les fossoyeurs.
Les fils et filles nourris de viande régurgitée par leurs père et mère bons parents (car nés de bons parents) sont gros et longévifs. Le destin de ceux dont les parents ont été eux-mêmes délaissés aux premiers âges de leur vie (donc mauvais parents) est sombre (la mortalité est élevée). Et si jamais un bon père procrée avec une mère délaissée tout au long de sa croissance (mauvaise mère), il ne vit pas vieux (car elle lui laisse tout le boulot).
Parmi les particularités phénotypiques des parents ou les conditions particulières qu’ils ménagent à leur descendance qui peuvent avoir des effets différés sur le succès reproductif de celle-ci, les soins aux jeunes viennent de faire l’objet d’un travail quantifié mené à l’université de Cambridge (Royaume-Uni) par une équipe multinationale. L’optique principale étant d’évaluer l’importance des effets parentaux sur la valeur adaptative des traits de comportement des jeunes.
C’est le Nécrophore fossoyeur Nicrophorus vespilloides (Col. Silphidé) qui a servi à cette étude. Il s’élève facilement au labo, se reproduit souvent. On peut le déranger (notamment peser les larves, indice fiable de leur espérance de survie). Manipuler les conditions du développement est aisé : faire des fratries orphelines, créer des familles monoparentales – toutes conditions existant en nature. Les résultats résumés ci-dessus s’appuient sur de telles manips et sur un modèle mathématique.
Rappelons que le Nécrophore vit aux dépens des charognes. Il (mâles et/ou femelles) les enterre, en fait une boule débarrassée des phanères. La femelle pond un œuf à côté. Les larves se nourrissent sur la boule de chair et peuvent aussi mendier de la nourriture régurgitée à leurs parents. Elles se développent en quelques jours avant de se disperser et de se nymphoser dans le sol. Les parents alors s’en vont à la recherche d’un nouveau cadavre.
Article source (gratuit, en anglais)

1059 Pretium doloris
Je ne manque jamais de coller un titre en latin (trad. Le prix de la souffrance) à une Épingle si c’est possible. Ni de signaler, pour l’honorer, un entomologiste couronné du prix IgNobel (trad. ignoble). La dernière fois, ce fut pour épingler les lauréats Gwynn D.T. et D.C.F Rentz – voir La petite mort sur bouteille.    
Cette année, un jury avisé a récompensé Michael Smith, entomologiste états-unien travaillant à l’université Cornell grâce à une bourse de la National Science Fundation, pour une recherche inédite sur l’Abeille domestique Apis mellifera (Hym. Apidé), publiée en 2014.
Avec sa manip, il s’inscrit dans la grande lignée des savants et des médecins qui, prenant tous les risques, ont expérimenté sur eux-mêmes pour conforter leur hypothèse ou contribuer à une découverte. On est dans ce dernier cas. Notre intrépide apidologue n’a-t-il pas défini 25 endroits du corps humain où il a appliqué une abeille pendant 5 secondes (pour être sûr que le dard était bien enfoncé) puis noté sur une échelle de 1 à 10, l’échelle de Schmidt, la douleur ressentie ?
Le schéma très clair que M. Smith a dessiné de son dispositif expérimental ajoute à son mérite.
Justin Schmidt, du centre d’apidologie Carl Hayden (en Arizona) est co-lauréat de ce prix IgNobel de Physiolgie et Entomologie.
D’après, entre autres, « The 10 Ig Nobel Winners of 2015: Penis Stings, Smooch Science and More », par Jeanna Bryner. Lu le 17 septembre 2015 à www.livescience.com/
Photo : Michael Smith recevant son prix le 17 septembre 2015 à l’université d’Harvard.
NDLR 1 : les prix IgNobel récompensent des travaux de recherche qui nous font d’abord rire et ensuite penser.
NDLR 2 : voici une manip reproductible (allergiques s'abstenir).

1058 Stridulomètre
La femelle du Grillon provençal Grillus bimacualatus (Orth. Gryllidé) reconnaît le mâle à sa stridulation. Celle-ci est composée de la répétition de 3 à 5 pulsations séparées de 30 à 40 ms. Elle est perçue par les organes auditifs portés par les pattes antérieures, transmise au cerveau par des neurones avec un relais dans le ganglion prothoracique.
Comment le cerveau « simple » (1 million de neurones) du grillon identifie-t-il ce signal ? L’étude a été menée au département de Zoologie de l’université de Cambridge (Royaume-Uni). Une femelle fixée par la tête est installée sur une boule de commande (trackball) qui enregistre ses pas ; deux haut-parleurs diffusent des stridulations d’appel sexuel synthétiques ; deux électrodes sont piquées dans son cerveau, qui doivent atteindre les neurones excités (cela peut prendre plusieurs heures) signalés par une fluorescence.
Le dispositif de reconnaissance du bon signal se révèle très simple : 5 neurones du protocérébron suffisent. L’excitation reçue par le neurone d’entrée est divisée : une partie déclenche un temporisateur (constitué de 2 neurones), l’autre atteint directement un détecteur de coïncidence. Si cette dernière a lieu, le neurone de sortie est activé et la grillonne reconnaît son grillon.
Posé comme hypothèse depuis plus de 20 ans, ce mécanisme de temporisation est peut-être fondamental. En tous cas, ce travail ouvre la voie à la recherche d’autres circuits neuronaux, chez le grillon, voire chez des animaux au cerveau plus complexe.
Article source  (gratuit, en anglais)  
Photo : neurone auditif excité dans le cerveau du Grillon provençal. Crédit: Berthold Hedwig/Stefan Schöneich.
  
1057 Le virus de la fourmi planétaire
La Fourmi d’Argentine Linepithema humile (Hym. Formicidé) est une espèce invasive remarquable et redoutable. Partie d’Amérique du Sud, elle a pris patte sur tous les continents, excepté l’Antarctique. La Nouvelle-Zélande a été colonisée en 1990. Une fois installée, elle construit une super-colonie : les ressortissantes d’une fourmilière reconnaissent leurs voisines comme des sœurs et ne les combattent pas, elles partagent les ressources avec elles. Les fourmis indigènes sont expulsées.
On a vu des colonies de cette espèce s’effondrer, sans cause visible. Un virus serait-il à l’œuvre ? Une équipe néo-zélandaise a extrait l’ARN de 2 lots de 30 ouvrières de 2 colonies distantes. A suivi la comparaison des séquences du matériel génétique avec celles contenues dans une base de données de virus d’insectes à ARN. Il est ressorti l’identification d’un virus nouveau, appelé Linepithema humile virus 1 (LHUV-1).
Ce virus est très proche du Cricket paralysis virus. Son rôle dans l’effondrement de populations de la Fourmi n’est pas établi.
Les découvreurs espèrent qu’il pourra fournir un moyen de lutte spécifique contre l’envahisseuse, sous forme d’appâts « farcis » au virus.
Mais les chercheurs néo-zélandais ont aussi trouvé que les fourmis étaient porteuses du Deformed wing virus, impliqué dans la disparition de l’Abeille domestique. Les fourmis visitent les ruches et récoltent du nectar sur les mêmes fleurs… Elles pourraient bien communiquer leur virus aux abeilles.
D’après « Newly discovered insect virus could combat invasive ants », par David Shultz. Lu le 8 septembre 2015 à //news.sciencemag.org/biology/
 
1056 La Balanine est l’avenir du Balanin
Le réchauffement climatique planétaire affectera tous les êtres vivants. Sous le climat méditerranéen, une sécheresse d’été accrue et plus longue influera sur les populations par le biais de mortalités, de fertilité réduite se traduisant par des déplacements, voire des disparitions. L’effet peut être plus imprévu, sans être moins important chez certaines espèces.
C’est ce que montre le cas du banal Balanin des châtaignes Curculio elephas (Col. Curculionidé). Chez ce ravageur des glands et des châtaignes, le taux sexuel (proportion de mâles dans la population) diminue fortement en fonction du retard dans la saison des pluies d’automne. Ce résultat, obtenu par une équipe espagnole, est, selon elle, le premier du genre.
À l’instar d’un bon nombre d’insectes méditerranéens, ce balanin sort de terre en automne – pour aller grimper à l’arbre au-dessus, une fois que les pluies ont ameubli le sol où il a effectué sa nymphose. Les mâles sont les premiers (« protandrie »), les femelles émergent de façon plus étalée. Des pluies tardives se traduisent par la perte de jusqu’aux 2 tiers des mâles, qui sinon sont en effectifs à peu près égaux à ceux des femelles.
L’étude a été menée à Huecas (province de Tolède), sur 25 chênes verts, durant 5 ans (de 2008 à 2012). Ces arbres, munis de pièges capturant les imagos grimpant sur les troncs (pour aller pondre dans les glands), ont intercepté 586 individus.
L’effet de la distorsion du taux sexuel sur la dynamique des populations du Balanin des châtaignes est probablement nul à court terme, car les femelles sont polyandres.
Article source  (gratuit, en anglais)
Fiche HYPPZ du Balanin des châtaignes

 
publiées dans Insectes n° 178

1055 Il prend les chenilles pour des champignons
La chenille de la Légionnaire d’automne Spodoptera frugiperda (Lép. Noctuidé), une noctuelle nord-américaine, mangent les feuilles du maïs. Celui-ci possède des feuilles engainantes qui, à chaque nœud font office de réceptacle pour les crottes des chenilles situées au-dessus. Une grande quantité de ces crottes s’y accumule et y demeure longtemps. Elles sont composées de molécules issues de la plante consommée, de l’insecte, et de bactéries.
Parmi tous ces composants, il doit y en avoir qui ont un effet sur la plante, que l’on sait par ailleurs exprimer une réaction de défense aux morsures et aux mouvements des chenilles, ainsi qu’à la ponte des papillons.
Une équipe du Penn State's College of Agricultural Sciences (États-Unis) a examiné l’effet de la défécation. Pour ce faire, la croissance des chenilles a été comparée entre 2 lots : sur maïs enduit d’un extrait des crottes, et témoin non traité. La résistance du maïs au champignon Cochliobolus heterostrophus (Plérosporacée, agent de l’Helminthosporiose du maïs) a été évaluée dans les mêmes conditions.
Il en résulte qu’après une courte période où les excréments induisent une réaction anti-chenille, la plante tourne ses défenses contre le champignon pathogène, en laissant croître et prospérer les chenilles qui la dévorent. Le maïs est trompé par un composant de la crotte de Légionnaire d’automne, qu’il reste à trouver.
On espère que de tels travaux déboucheront sur la production d’un antifongique bio efficace, quitte à supporter les dégâts de la noctuelle ou à s’en occuper par ailleurs.
D’après « Caterpillar deceives corn plant into lowering defenses against it », lu le 9 septembre 2015 à //phys.org/news/
Article source : DOI: 10.1007/s10886-015-0619-1 (payant)
 
1054 Bourdons cargos
Un trio australo-états-unien d’entomologistes, Andrew Mountcastle, Sridhar Ravi et Stacey Combes, a étudié le vol du bourdon sous l’aspect des perturbations causées par la charge qu’il emporte, nectar ou pollen. L’espèce choisie est le Bourdon fébrile Bombus impatiens (Hym. Apidé), commun aux États-Unis.
Les bourdons sont de bons voiliers, capables de ravitailler le nid même par mauvais temps. Ils rapportent du pollen, sur leurs pattes postérieures, ou du nectar, amassé dans le jabot situé à l’avant de l’abdomen. La charge de pollen peut équivaloir à la moitié de leur poids, celle de nectar à son entièreté.
Les expériences se passent au laboratoire. Avant d’entrer dans le tunnel de vol, les bourdons sont munis d’un repère (3 points en triangle équilatéral) et de charges : soit des billes d’acier collées sur les tibias qui représentent le pollen, soit des billes collées sur le dessus de l’abdomen juste au-dessus du jabot, qui miment la charge de nectar.
Dans le tunnel, trois conditions sont appliquées au bourdon : vent variable, calme zéphyr ou vent variable avec une fleur oscillant devant les yeux de la bête. Une caméra à haute fréquence filme, des modèles mathématiques aident à interpréter les variations d’attitude du bourdon.
L’emport d’une charge sur les pattes arrière (= pollen) plutôt que dans l’abdomen (= nectar) augmente le moment d’inertie de l’insecte en roulis et lacet mais pas selon l’axe de tangage. Le bourdon chargé de pollen est plus stable et vole plus vite par temps agité mais est moins performant quand il s’agit de viser une fleur mobile. D’où l’idée d’un arbitrage entre stabilité et manœuvrabilité.
Ce travail suggère que les conditions de vent ont un effet sur l’affouragement des abeilles en général, en leur imposant un choix des ressources alimentaires.
Article source (en ligne, gratuitement)
Image :

1053 Soucoupes rampantes
À l’université de Californie à Berkeley, on travaille à améliorer les robots insectoïdes. C’est l’Armée états-unienne qui finance, en partie, espérant disposer un jour de petits engins discrets capables de se faufiler partout pour glaner des renseignements. On travaille en parallèle à l’augmentation des performances des insectes appareillés – nos Zombiptères. Les robots en métal et silicium à 6 « pattes » (des lames rotatives) pourraient être fabriqués en série en grands nombres et ont notamment l’avantage d’être insensibles au froid et aux insecticides.
Pour améliorer la faufilabilité des petits hexapodes artificiels, la première piste explorée fut celle de l’augmentation des performances des capteurs (optiques et de contact) et des logiciels associés.
Mais nos chercheurs californiens viennent de faire une percée peut-être décisive. En observant (par le truchement d’une caméra à haute fréquence de prise de vues) comment des blattes en chair et en os se débrouillent dans la jungle d’une pelouse, réduite à un modèle constitué d’une plaque hérissée de bâtonnets. C’est Blaberus discoidalis (Blatt. Blabéridé), une grosse blatte sud-américaine très stable (voir l’Épingle « Renversant » de 2002), qui s’est prêté à l’exercice. Le cafard avance en roulant sur le côté, attaquant les obstacles par les bords latéraux de son pronotum et éventuellement de ses élytres.
Les blattes ont alors reçu des carrosseries de 3 formes : cône ovale, soucoupe renversée ronde, parallélépipède aux coins arrondis (le boîtier classique des engins mécaniques). Les robots hexapodes ont été traités pareillement. Dans les deux cas, la forme la plus ronde est la plus avantageuse.
Affubler les petits robots d’un couvercle en forme de soucoupe ronde renversée fait bien mieux pour leur faufilabilité - que les méta-entomologistes de Berkeley appellent « terradynamique » - que des capteurs et des logiciels plus pointus et bien plus coûteux.
Article source en ligne (gratis) : Chen Li et al., 2015. Bioinspiration & Biomimetics, 10(4).
À (re)lire, outre « Renversant », la dernière Épingle zombiptérologique « On lui casse du sucre sur le dos ».

1052 Plus de charme, moins d’asticots
Drosophila serrata, mouche du vinaigre australienne, sert à des études sur la sélection sexuelle et l’adaptation au climat. La sélection sexuelle est efficace pour augmenter la diversité des phénotypes. Sa contribution à l’adaptation et à l’élimination des mutations délétères reste inconnue.
D’où les travaux récents de Steve Chenoweth de l’université du Queensland, associé à des chercheurs canadiens, visant à démêler les rôles des sélections naturelle et sexuelle.
12 populations de D. serrata ont été élevées durant 13 générations dans des conditions où les possibilités d’accouplement étaient manipulées. Puis plus de 1 400 SNPs « snips » (séquences d’ADN différant par un seul nucléotide entre individus) ont été génotypés. Avec ce résultat inattendu : la sélection sexuelle et la sélection naturelle affectent les mêmes régions génomiques, avec des résultats parallèles ou opposés.
Le séquençage du génome des individus des différents lots, en fin de manip, a montré que la présence de certains gènes, jouant sur l’adaptabilité, augmente dans les cas où les mâles étaient peu nombreux face aux femelles mais s’atténuait chez les drosos placées dans les conditions normales. C’est-à-dire de harcèlement sexuel.
La suite est plus entomologiquement classique et relève d’observations du comportement. Les mouches qui ont la meilleure fitness (succès reproductif) sont naturellement les plus attractives. Elles passent tellement de temps à repousser leurs prétendants qu’elles pondent peu. La sélection sexuelle va donc à l’encontre de la sélection naturelle et annule les bénéfices de celle-ci.
D’après, entre autres « Attractive female flies harmed by male sexual attention », lu le 26 juin 2015 à //phys.org/news/
Photo (petite mais sexuellement explicite)




Une étude détruit le mythe de la fourmi travailleuse
, par Pierre Barthélémy. Le Monde, 30 septembre 2015.
[Temnothorax rugatulus, Hym. Formicidé]

Jeu de dupes entre la guêpe et l’orchidée,
par Nathaniel Herzberg. Le Monde, 25 septembre 2015.

Des papillons « OGM » sont produits régulièrement par les virus des guêpes parasites.
CNRS, 19 septembre 2015.

La pollution à l’ozone éteint le parfum des fleurs
,  par Pierre Barthélémy. Le Monde, 16 septembre 2015
Août
À cliquer

1051 Punaise-lapin-lion
La communication par l’intermédiaire d’ébranlements communiqués au substrat est très répandue. On la connaît chez presque tous les ordres. Dans la plupart des cas, le substrat est un organe végétal mais des insectes aquatiques la pratiquent aussi. Ce mode est adapté aux environnements bruyants (vent, pluie, congénères).
Une pratique originale vient d’être découverte chez deux punaises prédatrices Miridés, Macrolophus pygmaeus et M. costalis. La première est un agent de lutte biologique bien connu. Une équipe hispano-italienne conduite par Valerio Mazzoni a étudié leur communication – inaudible par l’oreille humaine - au moyen d’un vibromètre à laser.
Les femelles sont « muettes ». Le répertoire des mâles comporte deux sons distincts. Le « glapissement », bref, est émis par des individus immobiles durant la cour et lors de contacts entre mâles. Le « rugissement », son de durée plus longue et plus variable, est le fait d’individus qui marchent sur la feuille.
Si l’on repasse leurs vibrations aux punaises mâles, leurs émissions ne sont pas affectées mais la perception de rugissements enregistrés augmente leur activité locomotrice.
Chacune des espèces a un « langage » un peu différent.
Cette communication a un rôle social, qui reste à préciser. Et nos entomologistes n’ont toujours pas trouvé l’organe vibratoire, peut-être une structure dans l’abdomen. En tous cas, la punaise ne vibre pas.
D’après, entre autres, « The tiny insects that roar at each other like lions », lu le 28 août 2015 à www.newscientist.com/
L’article original est payant mais les vidéos sont en accès gratuit (cliquer sur Suplementary Material).

À (re)lire : La communication sexuelle chez la Punaise verte : entendre et sentir, par Michel Renou. Insectes n° 135 (2004-4).

1050 Pas d’acide pour la reine
Durant 3 jours, la jeune larve d’Abeille domestique est nourrie par les ouvrières de gelée royale, une sécrétion glandulaire. Les futures reines (fertiles et longévives) conservent ce régime tandis que les futures ouvrières voient leur pitance augmentée de pain d’abeille (pollen, miel et ferments lactiques) et de miel. On s’est longtemps interrogé sur la substance présente dans la gelée royale qui déterminait le destin de reine.
Une équipe de l’université de l’Illinois (États-Unis) a recherché dans le pollen et le miel, substances d’origine végétale, ce qui orientait les larves ainsi nourries vers la caste des ouvrières. Leurs expériences ont mis en évidence le rôle de l’acide p-coumarique, toujours présent dans le pollen et le miel, absent de la gelée royale. Cet acide très répandu est connu comme anti-oxydant agissant sur les gènes de l’immunité et de la détoxification. Il a un effet inhibiteur sur le développement ovarien, ce qui a été montré en nourrissant des larves au laboratoire avec de la gelée royale additionnée d’acide p-coumarique : les imagos ont des ovaires réduites.
On ignore si cette régulation par une substance phytochimique est répandue chez les Hyménoptères sociaux.
Article source

1049 Quand la diversité naît de l’adversité
Chez la Mouche du vinaigre, normalement, un quart des asticots reçoit les gènes du père, un quart ceux de la mère, et le reste un mélange, ce sont les « recombinants ». Si les conditions changent, il y a des chances qu’il se trouve dans la moitié « mélangée » des descendants adaptés, les pures copies des parents étant éliminées ou voyant leur fertilité réduite.
Nadia Singh (université d’État de Caroline du Nord) et Todd Schlenke (Reed College, Oregon), pour éprouver cette théorie, ont examiné la descendance d’individus ayant souffert d’infections bactériennes (2 types utilisés) ou de parasitisme par Leptopilina clavipes (Hym. Figitidé). Ce dernier pond dans les asticots, ses larves s’y développent en les grignotant de l’intérieur, à moins d’être tuées par le système immunitaire.
Les mouches femelles survivantes à ces agressions produisent, à la surprise des expérimentateurs, une proportion bien plus grande de recombinants que les témoins. Les mères drosos s’arrangent pour produire une descendance variée, au sein de laquelle il doit y avoir plus de résistants aux bactéries et au parasitoïde que dans la génération précédente.
Comment ? Il y a un signal, inconnu à ce jour, qui traverse tout le développement larvaire et la nymphose, soit bien avant que les oocytes soient formés et que la recombinaison des chromosomes se fasse.
Cette nouvelle modalité d’influence parentale sur le succès reproductif (fitness) des descendants se rencontre sans doute chez d’autres insectes et mérite d’être étudiée plus avant.
D’après « When fruit flies get sick, their offspring become more diverse », lu le 13 août 2015 à //www.eurekalert.org/
Photo : femelle de Leptopilina clavipes injectant un œuf dans un asticot de Drosophila.

1048 Droguées et asservies
Publiés dans Current Biology, les travaux signés Masaru Hojo, Naomi Pierce et Kazuki Tsuji (université de Kobé, Japon) précisent la relation curieuse entre un papillon et une fourmi.
Les chenilles de Lycénidés sont – pour la moitié des espèces de cette famille - associées à des fourmis auxquelles elles procurent du pseudonectar en échange de leur protection, selon des modalités variées. Les espèces myrmécophiles possèdent plusieurs glandes exocrines dont les sécrétions servent à assurer et à réguler leurs relations avec les fourmis. Il s’agit notamment de la glande de Newcomer sur le 7e tergite abdominal – d’où sourd un pseudonectar nutritif – et des organes en clou, alias organes éversibles latéraux, sur le 8e segment, qui servent à attirer ou alerter les fourmis en compagnie desquelles elles vivent.
Narathura japonica (Thécliné), originaire du Japon et répandu en Extrême-Orient, se développe sur les feuilles des chênes, notamment. On pensait que les jeunes chenilles étaient associées dans une relation à bénéfice mutuel – nourriture contre protection – à la fourmi Pristomyrmex punctatus (Hym. Myrmyciné). Or il est apparu que les fourmis ayant consommé le pseudonectar, au lieu de vaquer parmi leurs congénères, restaient contre la chenille, comme engourdies.
Ce comportement a été reproduit au laboratoire où l’on a observé en plus que les fourmis consommatrices réagissaient à l’éversion des organes en clou (signe d'alerte) en s’agitant et en agressant tout ennemi potentiel. À l’analyse, leur cerveau montrait un déficit en dopamine. Traitées avec de la réserpine (inhibiteur de la dopamine chez la drosophile), les fourmis ont vu leurs mouvements ralentis.
La chenille manipule le comportement des fourmis en sa faveur, en les maintenant auprès d’elle, comme des gardes du corps. Il reste à identifier, dans le pseudonectar fourni par la glande de Newcomer, la ou les substances qui affectent le métabolisme de la dopamine chez la fourmi.
D’après, entre autres, « Caterpillar chemical turns ants into bodyguards », par Bob Yirka. Lu le 3 août à //phys.org/news/
Photo
À (re)lire : Le Chlorion et autres manipulateurs, par Alain Fraval. Insectes n° 163 (2011-4).


Un coléoptère qui ne manque pas de piquant : Onychocerus albitarsis, par Benoît Gilles. Passion entomologie, 31 août 2015.
[Col. Cérambycidé]

Les fourmis, malades et médecins, par Nathaniel Herzberg. Le Monde (abonnés), 31 août 2015.

Agrilus derasofasciatus, un bupreste sur la vigne. Le Jardin de Lucie. 31 août 2015.
[Agrile de la vigne]

Phylogénie des Dictyoptères : origine des blattes, des termites et des mantes-religieuses. Par Benoît  Gilles. Passion entomologie. 3 août 2015.
Juillet
À cliquer
 
1047 Cruciverbisme chez la Punaise soldat
Podisus maculiventris (Hém. Pentatomidé), dite Punaise soldat, est une punaise d’origine nord-américaine répandue, utilisée comme auxiliaire de lutte biologique contre le Doryphore. À Montréal (Canada), Paul Abram élève cette punaise pour étudier un parasitoïde. Dans le fond de la cage d’élevage, il étend du journal, sur lequel pondent ses pensionnaires.
Sur les cases noires des grilles de mots croisés, les œufs sont sombres ; sur les cases blanches ils sont clairs. Cette observation est le point de départ d’un travail de recherche qui aboutira à la découverte du premier animal qui adapte la couleur de ses œufs à la luminosité du substrat.
Dans des boîtes de Petri peintes en noir (où Madame Punaise est munie d’un compagnon de son espèce et d’un autre d'une autre espèce à ponctionner), les œufs sont sombres. Dans celles peintes en blanc, ils sont clairs sur le fond, un peu moins sur les parois et encore moins sous couvercle. Ces résultats se retrouvent dans chaque moitié des boîtes peintes moitié en noir, moitié en blanc.
Et dans des conditions plus proches de la nature ? En lumière vive, les punaises en cages pondent des œufs sombres sur les feuilles (de soja) et des œufs clairs en dessous, résultat retrouvé mais moins tranché en lumière atténuée.
Exposés à 4 doses différentes de rayons UV, les œufs survivent d’autant mieux que cette insolation est faible et la teinte sombre les protège effectivement.
Une dernière série de manips, enfin, a permis de séparer l’effet des rayons UV sur la mère et sur les œufs pondus. C’est la mère qui détermine la teinte plus ou moins sombre des œufs et pas les œufs en place qui « bronzent ». Et ceci en fonction de l’évaluation qu’elle fait de la différence relative entre éléments ensoleillés et éléments à l’ombre de son environnement.
Dernière découverte : le pigment qui assombrit le chorion des œufs n’est pas la mélanine, colorant noir universel chez les insectes. Sa nature chimique reste à identifier.
Il reste finalement à préciser le rôle écologique de cette pigmentation en fonction de la luminosité – protection contre les UV et/ou camouflage – et le mécanisme à l’œuvre chez la mère pondeuse. Et à trouver d’autres cas, qui ne devraient pas être rares.
D’après entre autres « Female stink bugs 'select' the color of their eggs ». Lu le 23 juillet 2015 à //phys.org/news/
En ligne gratuitement, l’article source (résultats et discussions seulement)
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NDLR : une histoire semblable de découverte par accident au fond d’une cage est à rappeler, qui s’est passée chez les Gendarmes. Il y a 50 ans, Karel Slama et Caroll William découvraient un analogue de l’hormone juvénile des insectes d’origine végétale en comprenant pourquoi leurs punaises Pyrrhocoris apterus (Hém. Pyrrhochoridés, nos Gendarmes ou Cherche midi), apportées de Tchécoslovaquie et élevées dans le Massachusetts à Cambridge, ne dépassaient pas le 5e stade larvaire.
Rien à faire et pourtant les conditions d’élevage étaient semblables : graines de tilleul pour l’alimentation, papier journal pour grimper dessus. Gendarme frustrés de n’avoir pas leurs mots croisés en tchèque ? Cette plaisanterie répétée sous une forme ou une autre à tous les étudiants à part, le responsable était bien le papier, fait en Amérique notamment à base de sapin baumier Abies balasamea absent des papiers (journal, filtre, d’emballage…) européens et japonais.
Suite à cette mis en évidence du « paper factor », de grands espoirs ont été placés dans les « inhibiteurs de croissance » et de nombreuses formulations ont été proposées pour la lutte contre les ravageurs et les vecteurs. Cette classe d’insecticides est par principe sans effet sur les vertébrés, l'effet est lent, la spécificité est variable et des cas de résistance sont apparus.

1046
L’alcool pour survivre au froid
Il est bien connu et admis que les insectes sont le taxon dominant notre planète. Ils sont beaucoup et partout, exhibant une diversité de formes et de fonctions inégalée. Ils constituent plus de la moitié de la biodiversité terrestre, bactéries exclues. On les trouve dans les habitats les plus divers, qu’ils ont su coloniser au cours de l’évolution, et notamment dans des environnements spécialement arides ou froids.
Leur étonnante survie au froid, en particulier, est attribuée à leur capacité à accumuler de grandes quantités d’alcools, glycérol et sorbitol notamment, dans leurs cellules. Comment font les insectes holométaboles, qu’on sait avoir perdu (au cours de leur évolution) les aquaglycéroporines, canaux membranaires qui transportent normalement le glycérol ?
Une équipe hispano-norvégienne vient de découvrir les « entomoglycéroporines » (EGLP) chez ce groupe d’insectes le plus « évolué ». Par les outils du génie génétique, ils ont montré que ces canaux ont remplacé les aquaporines (on peut répéter la mutation au laboratoire).
Ceci s’est passé à une époque où des changements de climat brusques ont précédé les Glaciations. Les insectes munis d’EGLP ont pu acquérir, entre vie larvaire et stade imaginal, le stade nymphal caractéristique des Holométaboles, stade très sensible au froid et résistant grâce aux alcools stockés. Un exemple de sélection darwinienne.
D’après « Discovery of new genes suggest why insects are the most evolutionarily successful organisms ». Lu le 17 juillet à //phys.org/news/
Article source (gratuit)


1045 Tout le monde en cœur, jusqu’à la fin
Ces demoiselles s’en donnent à cœur joie jusqu’à leur dernier battement d’ailes. Pendant toute leur vie (adulte !), les Agrions jouvencelles (alias fillettes) copulent et recopulent. Ce avec une ardeur constante – puis meurent. L’âge n’a aucun effet débilitant sur leur « libido ».
Sous la houlette de David Thompson (université de Liverpool), une équipe anglo-finlandaise a observé les individus de Coenagrion puella (Odon. Coenagrionidé) se rapprocher, les mâles se battre, les cœurs se former (et tenir 30 mn), la dame honorée s’en aller pondre suivie de son amant (pendant 90 mn). Et recommencer jusqu’à ce que mort s’en suive, au bout d’une semaine au plus. Ceci autour d’une petite mare du Queen Elizabeth Country Park à Petersfield (Royaume-Uni).
Il y a des mâles costauds et d’autres chétifs qui auront moins de succès mais les vieux costauds ont autant leurs chances que les jeunes de même acabit.
Ce résultat est surprenant. La sexualité « a un coût », la production de sperme et d’ovocytes, les compétitions, la ponte sont sources de dépenses métaboliques et de dangers. Il en est tenu compte en dynamique des populations d’insectes et autres animaux : plus les copulations sont répétées moins les individus vivent vieux (ce qu’avait déjà postulé Aristote, étudiant Homo sapiens).
Le phénomène est-il isolé, commun aux demoiselles et libellules (Odonates), présent chez d’autres insectes ? Ce sont les prochains sujets de recherche.
D’après « Age doesn't dull damselfly sex ». Lu le 15 juillet 2015 à //phys.org/news/
Photo : cœur d’Agrions jouvencelles (marqués). Cliché Phil Watts.
NDLR : manger des demoiselles et des libellules n’aucun effet de ce genre connu chez l’entomophagiste. À (re)lire toutefois Des libellules dans l’assiette, par Nicolas Césard. Insectes n° 140 (2006-1).   


1044 Moustiques anti-moustiques

Au Brésil, sévit la dengue, maladie grave transmise par Aedes aegypti (Dip. Culicidé). Elle y est réapparue en 1981 après avoir été maîtrisée par des traitements au DDT. Aucun vaccin ni médicament n’existent et la lutte repose sur l’élimination du vecteur.
Le journal PLOS Neglected Tropical Diseases publie les résultats très satisfaisants d’un essai de lutte autocide, mené par Oxytec (entreprise de biotechnologie britannique) avec les moyens techniques de Moscamed (programme de lutte autocide contre la Mouche méditerranéenne des fruits Ceratitis capitata – Dip. Téphritidé).
Dans ce cas, la lutte « par mâles stériles » repose sur le lâcher de mâles génétiquement modifiés, baptisés OX513A, compétitifs avec les mâles sauvages et porteurs d’un gène létal qui ne s’exprime pas en présence d’un antibiotique. Dans la nature, privée évidemment de cet antidote, la descendance meurt au stade larvaire. Le tri des nymphes permet d’éviter de lâcher des femelles – il n’en en reste qu’1 pour 4 300 mâles. Un marqueur fluorescent est ajouté à ces moustiques transgéniques.
L’essai a eu lieu à Juazeiro (État de Bahia), sur une zone comportant 424 maisons et peuplée de 1 810 habitants, avec une zone témoin équivalente. En tout 185 000 mâles y ont été dispersés.
Les piégeages (d’œufs et d’adultes) ont indiqué une réduction de 95% de l’effectif d’A. aegypti, résultat conforme à celui obtenu précédemment sur les îles Caïman, et très intéressant : la population résiduelle est incapable de transmettre le virus. Mais d’autres moustiques diurnes comme le Moustique tigre A. albopictus en sont vecteurs.
Article source (gratuit, en anglais)
À (re)lire : OX3604C, moustique suicide, par Alain Fraval. Insectes n° 168 (2013-1).


Publiés dans Insectes n° 177

1043
Ça se complique !
Les insectes piqueurs-suceurs sont incapables de vivre sans l’apport d’acides aminés essentiels fournis par des symbiontes internes. Les cigales hébergent deux bactéries, Sulcia et Hodgkinia (Candidatus Hodgkinia cicadicola de son nom complet), objets des travaux de John McCutcheon et son équipe à l’université du Montana (États-Unis).
Parmi les insectes piqueurs-suceurs, les cigales se distinguent par une durée de vie très longue, de 2 ans au minimum jusqu’à 13 et17 ans pour les cigales périodiques nord-américaines. Des conditions particulières pour leurs symbiontes.
Ayant découvert que Hodgkinia s’était dédoublée en 2 espèces nouvelles, les chercheurs ont postulé que chez les espèces les plus longévives, cette bactérie avait eu l’occasion (depuis 10 millions d’années) de donner naissance à plusieurs espèces. Examinant (par séquençage des gènes) le bactériome de Magicicada tredecim, ce sont des douzaines d’espèces nouvelles, génétiquement bien séparées, qu’ils ont trouvées : une « extravagante complexité ».
De son côté, Sulcia est restée unique, sans doute à cause d’un taux de mutation très bas.
Pour John McCutcheon, il s’agit là d’un cas d’évolution qui n’est pas une adaptation et les cigales affrontent un problème délicat. En effet la fonction initiale de H. cicadicola – la fourniture d’acides aminés -, est désormais répartie entre une foule d’espèces et chacune est indispensable. On doit se demander comment la cigale arrivera à gérer une symbiose à d’aussi nombreux partenaires.
Ces travaux ne concernent pas seulement l’entomologie : ce qui se passe dans les cigales devrait permettre de comprendre l’histoire des organelles, comme les mitochondries, résultats d’une très ancienne symbiose.
Étude publiée dans PNAS sous le titre « Genome expansion via lineage splitting and genome reduction in the cicada endosymbiont Hodgkinia », en ligne gratuitement.

1042 Plus noire est la nuit…
Mieux se portent les papillons. Aux Pays-Bas, où la « pollution lumineuse » augmente de 6% chaque année, une étude vient de conforter cette hypothèse. Koert van Geffen, à l’université de Wageningen, ne s’en est pas tenu aux classiques observations sur les papillons de nuit attirés fatalement par les lampadaires. Il a étudié les effets de nuits atténuées par la lumière sur la Noctuelle du chou Mamestra brassicae (Lép. Noctuidé).
La chenille, qui sort nuitamment de son abri pour manger, ne voit pas son développement altéré. Mais au stade chrysalide, la diapause est perturbée. Les individus soumis à de longues nuits (d’automne) éclairées n’y entrent pas et les papillons éclosent à l’orée de l’hiver…
C’est aussi pendant la nuit qu’a lieu la rencontre des sexes, la femelle émettant des phéromones – parfums volatiles – attractives pour le mâle. Si la nuit est éclairée par des lumières artificielles, non seulement la quantité de phéromones baisse mais leur qualité aussi. Dans ces conditions un quart des femelles sont fécondées, contre la moitié si le noir est complet.
La qualité de la lumière polluante intervient : ce sont les courtes longueurs d’onde qui ont les effets les plus marqués. Des éclairages rouges n’ont pas d’influence sur la Noctuelle du chou. Peut-on modifier éclairages publics et privés pour moins nuire aux papillons ?
D’après « Moths prefer to reproduce in the dark ». Lu le 3 avril 2015 à //phys.org/news/

1041 La rigidité augmente avec l’âge
La rigidité est celle des comportements, l’âge est celui du Grillon champêtre Gryllus campestris (Orth. Gryllidé).
Tom Tregenza et son équipe (université d’Exeter, Royaume-Uni) ont obtenu ce résultat en suivant les variations de la personnalité des individus d’une population sauvage tout au long de leur vie.
Dans une population, les comportements individuels diffèrent d’un individu à l’autre et il est intéressant d’étudier leur variabilité durant leur vie, ce caractère pouvant avoir une valeur adaptative. Le Grillon champêtre se prête bien à son étude.
Le dispositif expérimental consiste en une prairie – située dans le Nord de l’Espagne - où sont installés des grillons adultes depuis 3 jours, capturés dans la nature et marqués. 120 (en 2013) à 133 (en 2014) caméras assurent la surveillance. On recapture les grillons (un tube à l’entrée du terrier) tous les 10 jours (un grillon vit en moyenne 25 jours). Ils passent alors 2 heures au labo pour s’y retrouver dans un autre tube (noir), débouchant sur une boîte transparente, la tête vers la sortie. Une caméra filme. 2 épreuves de 30 minutes leur sont imposées. Ce qu’on note et évalue : s’il sort du tube ou pas, au bout de combien de temps il sort (sa « timidité), son activité dans la boîte (mesurée par le nombre de rencontre avec des fils tendus) et sa tendance à l’exploration (même compte, mais durant la première minute hors du tube).
Il en résulte que les individus ont chacun leur personnalité (plus ou moins timide, actif, explorateur) qu’ils gardent. Les différences interindividuelles sont plus grandes lorsqu’ils sont vieux. Avec l’âge, l’adaptabilité à des conditions changeantes diminue donc. À noter que les grillons seniors sont plus actifs que les jeunes.
Article source : doi: 10.1093/beheco/arv048 – en ligne gratuitement.
La plante qui tue pour nourrir ses gardes du corps, par Pierre Barthélémy. Le Monde, 26 juillet 2015.
[Heliothis phloxiphaga, Lép. Noctuidé / Pselliopus spinicollis, Hém. Réduviidé]

La bactérie tueuse d’oliviers est arrivée en Corse, par Rémi Barroux. Le Monde, 23 juillet 2015.
À (re)lire : Le Cercope des prés..., par Alain Fraval. Insectes n° 177 (2015-2).

Processionnaire du pin : les arbres ornementaux, acteurs clés dans la progression des ravageurs.
INRA, 15 juillet 2015.
À (re)lire : La processionnaire du pin, par Alain Fraval. Insectes n° 147 (2007-4).


Le territoire des bourdons se rétrécit sous l’effet du réchauffement climatique
, par Pierre Le Hir. Le Monde, 10 juillet 2015.
Juin À cliquer
1040 Surveillance par drones
Microsoft, on connaît. C’est une firme géante états-unienne qui fait dans l’informatique. Elle vous a fait vouer aux gémonies (souvent) votre système d’exploitation MS-DOS, puis les versions successives de Windows. Elle s’en prend maintenant aux moustiques vecteurs.
Son projet, qui s’appelle Premonition, est dirigé par Ethan Jackson. L’équipe se donne quelques années pour réussir. Le but est de prévenir les maladies transmises par ces Diptères, en récoltant et analysant les moustiques et ce qu’ils hébergent – par analyse des ADN.
Comme moyen de capture, Microsoft emploiera des drones, qu’il est possible d’envoyer à la chasse dans tous les recoins des paysages. Ces aéronefs embarqueront un piège d’un nouveau type, avec un appât plus efficace, un dispositif de détermination et de tri (pour ne retenir que les moustiques surveillés) et un système chimique de préservation des échantillons. Pas de précisions. Une photo du prototype.
En disposant quasi-immédiatement des données, brassées et rendues interprétables par « cloud computing », les services de santé seront à même de déployer les moyens (des vaccins aux lits d’hôpital) pour enrayer les épidémies.
D’après, entre autres, « Project Premonition aims to use mosquitoes, drones, cloud computing to prevent disease outbreaks », lu le 10 juin 2015 à //blogs.microsoft.com/next/
NDLR : Microsoft, autant que je sache, n’a pas prévu d’en finir avec les moustiques infectants en équipant ses drones d’un canon laser capable de les cibler. Chez Microsoft, on n’a pas lu l’Épingle « Guerre des étoiles » de 2009.


1039 La génération du changement
C’est comme une enquête à la télé. Ça se passe aux États-Unis. On ressort des cadavres du congélateur, on leur fait subir les analyses d’ADN avec les derniers outils de la biologie moléculaire et… on découvre pourquoi Rhagoletis pomonella (Dip. Téphritidé) qui vivait sans faire de mal à personne sur son aubépine ancestrale est devenue tout à coup, peu après 1850, la Mouche de la pomme, peste pour les pomiculteurs.
En fait il existe toujours des R. pomonella « ancestrales » qui pondent dans les cenelles. Celles qui se développent dans les pommes ont leur cycle décalé de 3 semaines environ. Il y a, pour une faible part des populations, croisement entre les 2 « races », qui ne forment donc pas des espèces distinctes mais qui sont soumises à une forte pression de sélection en faveur de leur séparation.
Ce cas intéressant de spéciation sympatrique avait été étudié dans les années 1990 et une grosse collection de mouches a été conservée, de populations naturelles et d’élevages. Le réexamen de ces spécimens congelés a été entrepris par Scott Egan et ses collaborateurs anglais et états-uniens. Il en résulte – publication dans Ecology Letters - le fait étonnant que le passage de la cenelle à la pomme s’est fait en une seule génération, il y a 170 ans. Plus précisément, 70% de la variation actuellement constatée liée au changement d’hôte – qui concerne de nombreux gènes - est survenue en 1 an, il y a 170 générations.
Le génome de R. pomonella contient de nombreuses zones d’inversion (où les séquences d’ADN sont à l’envers). D’où un grand déséquilibre de liaison qui favorise l’impact de la sélection.
R. pomonella avait des prédispositions pour devenir une peste.
D’après « Evolution study finds massive genome shift in one generation », par Jade Boyd. Lu le 15 juin à //news.rice.edu/

1038 Centre d’information et d’orientation
Elles savent où elles sont, vers où elles se dirigent. Elles ont une boussole (à mémoire) dans le crâne.
Elles, les Mouches du vinaigre, avaient révélé à Vivek Jayaraman et Johannes D. Seelig (Howard Hughes Medical Institute en Virginie, États-Unis) qu’elles possèdent dans leur cerveau une petite zone dédiée à l’orientation, dans le corps ellipsoïde.
Il y a là un groupe de neurones fonctionnant comme une boussole, qui sert à la drosophile à se repérer dans l’espace à partir des signaux visuels et de la position de son corps, déduite de l’arrangement de ses pattes. La Mouche du vinaigre, dépourvue de compas magnétique et insensible au plan de polarisation de la lumière, navigue en effet à l’estime.
Nos chercheurs ont réussi à détecter l’activité de ces neurones, chez des individus génétiquement modifiés pour que ces cellules s’« allument » quand elles « travaillent ». Pour ce faire, ils ont classiquement collé des individus par la tête au bout d’une tige et les ont fait trotter (et s’arrêter) sur une boule de commande au centre d’un paysage artificiel (des lignes verticales mouvantes), cependant que leur cerveau était dans l’objectif d’un microscope.
Très grosse surprise. Les neurones excités sont disposés en cercle et s’« allument » à droite ou à gauche selon l’orientation et ce même dans le noir (où l’information ne provient que des pattes). Après un repos, la boussole se remet dans la position antérieure : la droso a gardé la mémoire de l’orientation de l’axe de son corps.
D’après les auteurs, on est redevable à la Mouche du vinaigre de la découverte d’un mécanisme sans doute universel, car tous les animaux ont besoin de savoir où ils sont et vers où ils se dirigent.
D’après « The Circle That Gives Fruit Flies Direction », par David Frank et James Gorman. Lu le 8 juin à www.nytimes.com/

1037 Il y a beaucoup moins d’insectes
Deux ou cent millions ? Ces nombres encadrent les estimations faites du nombre d’espèces composant le monde vivant sur Terre. Ils devraient, s’ils étaient affinés, satisfaire notre curiosité et servir d’appui aux évaluations proposées de la magnitude de la « 6e extinction de masse » qu’on admet être en cours. Mais que valent-ils ?
Plusieurs modes de « calcul » ont été proposés, qui reposent notamment sur des extrapolations hardies ou des hypothèses sans fondement : par exemple, on déduit de la proportion d’espèces nouvelles dans le peuplement tombé d’un arbre (soumis à un traitement insecticide de choc) le nombre d’espèces à découvrir ailleurs ou on pose que le nombre d’espèces est grosso modo le même dans tous les genres.
Nigel E. Stork et ses collaborateurs se sont attaqués au problème en le réduisant d’abord à celui des Coléoptères – dont les 350 à 400 000 espèces décrites constituent 40% de tous les arthropodes et le quart des espèces connues. Leurs principales familles sont représentées partout sur Planète. Leur méthode la plus innovante repose sur la constatation que les gros coléos sont découverts avant les petits, sur l’hypothèse très vraisemblable que la répartition des tailles est universelle et sur la certitude que toutes les espèces britanniques sont décrites. En comparant du point de vue de la taille un échantillon de cet ensemble - conservé au Natural History Museum de Londres (Royaume-Uni) - avec les coléos du reste du monde des collections du même institut, on est arrivé à une nouvelle estimation.
Celle-ci est la même que celle obtenue par 3 autres méthodes proposées depuis quelques années, reposant sur la spécificité d’hôte, les rapports avec les autres taxons et les relations plantes-insectes. Il existerait ainsi 1,5 millions de Coléoptères (entre 0,9 et 2,1 millions), soit beaucoup moins que ce que les auteurs ont indiqué jusque-là depuis les années 1980, soit 17,5 millions (de 4,9 à 40,7).
Quant aux insectes, il n’y en a « seulement » que 5,5 millions d’espèces.
D’après notamment « Not so crowded house? New findings on global species richness ». Lu le 1er juin 2015 à //phys.org/news/
Article source (gratuit, en anglais)


Mai
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1036 L’odeur du mâle
Le Ténébrion olifant Gnathocerus cornutus (Col. Ténébrionidé) est polyandre, ses populations comptent autant d’individus des deux sexes. La compétition est sévère entre mâles.
La femelle exerce une sélection spermatique postcoïtale et ses prétendants savent grosso modo combien de concurrents ont conclu avec Madame, ou tout au moins combien tournent autour. De 1 à 3, ils produisent un éjaculat plus abondant, avec l’espoir d’une descendance plus nombreuse. Au-delà de 3, ils renoncent à faire la cour.
Celle-ci consiste à monter sur le dos de l’élue et à lui tapoter l’abdomen pendant jusqu’à 10 minutes avec sa patte arrière, avant qu’elle ne se livre. L’exercice s’accompagne de l’échange d’hydrocarbures cuticulaires, soit des odeurs spécifiques. La femelle sent d’autant plus le mâle qu’elle en a connu un nombre plus élevé. Le mâle est ainsi renseigné olfactivement sur ses antécédents copulatoires et fait comme indiqué plus haut.
On doit ces résultats à une équipe d’entomologistes de l’université d’Exeter (Royaume-Uni). Leur manip a consisté à manipuler l’odeur des femelles en les parfumant à la senteur de mâles, d’observer les copulations et de disséquer lesdites femelles pour compter les spermatozoïdes reçus.
Article source (gratuit, en anglais)

1035 Attrape-mouche 2.0
C’est un robot au savoir-faire, au doigté, à l’agilité, à la finesse, à la rapidité qu’aucun entomologiste (de paillasse) ne peut égaler. Mis au point par Marc Schnitzler (université de Stanford, États-Unis), l’outil repère, identifie, manipule… des drosophiles vivantes et conscientes (en tous cas non anesthésiés). Il peut traiter 1 000 individus en 1 heure.   
Ce robot ressemble à la maquette d’un engin interplanétaire qui survolerait une boîte de Petri, où sont parquées des Mouches du vinaigre. Un flash infrarouge illumine chacune (laquelle ne perçoit rien) ; l’examen de leur photographie par un logiciel de reconnaissance thoracique les identifie une par une.
Un tube aspirant émergeant du dessous de l’engin poursuit l’individu choisi, le soulève et le dispose pour la suite du programme : reconnaissance du sexe (sexage) et même de la souche (tri), exercice sur une boule de commande (trackball) en réponse à des odeurs, jusqu’à la microchirurgie céphalique pour des expériences de neurophysiologie.
« Mes doctorants, au lieu de manipuler des mouches sous la bino à longueur de journée, feront des manips » dit en substance un des collaborateurs de cette invention.
D’après « Fly-catching robot developed by Stanford scientists speeds biomedical research », lu le 26 mai 2015 à www.domain-b.com/
Image
Vidéo au ralenti de la capture d’une droso

1034 Trouillométrie
La Mouche du vinaigre est un outil pratique, génétiquement modifiable, pour étudier les circuits neuronaux et expérimenter mais comment interpréter son comportement ? Ainsi, lorsqu’on fait passer sur elle l’ombre de la main, a-t-elle peur ? On la voit réagir ; est-ce un réflexe simple face à une menace ou passe-telle par un état émotionnel ?
Des chercheurs californiens répondent que la droso ressent quelque chose qui s’apparente à la peur – mais qui nous est inaccessible. Pour cela, ils ont préalablement postulé qu’un être simple (comme une mouche) pouvait entrer dans un état interne caractérisé par 4 propriétés des réponses au stimulus : la progressivité, la persistance, la valence et la généralisation. L’examen de ces critères doit garantir l’absence de tout anthropomorphisme.
Leurs expériences ont consisté à relever (via une caméra et un logiciel ad hoc) les comportements d’individus placés dans une boîte de Petri au dessus de laquelle un disque passe et fait de l’ombre. Les mouches partent en courant, sautent ou se figent. La vitesse de fuite et la fréquence des sauts augmentent avec le nombre et la fréquence du stimulus (le passage de l’ombre). Les drosos en train de s’alimenter se dispersent puis reviennent après un délai, qui augmente avec la fréquence du stimulus.
On en déduit que les mouches ont vu leur état interne modifié selon des lois qui correspondent aux critères proposés. On ne peut parler de peur, ni même de réaction analogue à celle des mammifères. Mais, une fois les neurones responsables identifiés et leur fonctionnement décrit, on disposera, espère-t-on, d’un insecte-outil pour expérimenter sur la peur – la nôtre.
D’après, entre autres, « Study reveals fruit flies exhibit the building blocks of emotion », lu le 14 mai 2015 à //phys.org/news/
La publication de cette étude dans Current Biology : dx.doi.org/10.1016/j.cub.2015.03.058 (payant).

À lire : L’ombre de la peur plane sur la mouche, par Florence Rosier. Le Monde (abonnés), du 18 mai 2015.

1033 La taille importe
On admet désormais que pour beaucoup d’espèces, l’évolution des organes sexuels est due à la sélection sexuelle. Mais il reste très difficile d’établir la corrélation entre fitness (succès reproductif) et particularité morphologique. Un mâle doté d’un pénis encombrant, long comme les 2/3 de son corps, à introduire dans le conduit spermathécal bien plus court de la femelle a tout pour constituer un bon modèle d’étude.
D’où cette manip, d’une équipe britannique, en 2 parties : l’observation in copula des organes génitaux et la modification de la variable longueur du pénis d’autre part.
Des couples sont mis à s’accoupler et, au bout de 2 heures, plongés dans l’azote liquide. Bien mieux que les dissections ou les coupes sériées faites jusque-là, l’usage d’un tomographe à rayons X permet d’observer la partie distale de l’édéage enfoncé jusque dans la spermathèque et tire-bouchonné dans la bursa de la femelle.
Avec des micro-ciseaux, on rogne le pénis d’individus interrompus au début du coït et refroidis (ils ne gigotent pas). Trois degrés d’amputation : (a) de 2 mm soit du tiers de sa taille normale, (b) de 1 mm et (c) de presque rien correspondant à la variation normale. Des témoins accompagnent les modifiés. Tout le monde est remis avec des femelles vierges ; on compte les copulations, on mesure leur durée ; la ponte d’au moins 1 œuf est enregistrée comme succès de l’insémination et leur nombre comme succès de la fertilisation. Puis tout le monde finit au congélo.
Les mâles (a) copulent autant que les témoins, cela dure moins longtemps et les naissances sont rares. Le traitement (b) ne modifie pas les performances des couples (mais effectif trop faible) tandis que le (c) indique notamment que les mâles les plus gros sont les plus fertiles.
Bref, l’opération en elle-même ne gène pas les opérés ; l’insémination a lieu quelque soit la taille du pénis mais la longueur de l’organe influe sur le succès reproductif. Le mécanisme reste encore hypothétique.
Pour cette manip très médiatisable, ont donné leur vie à la science des dizaines et des dizaines de Punaises nébuleuses, Lygaeus simulans (Hem. Lygéidés).
Article source (en anglais, gratuit), publié le 13 mai 2015.

1032 Brouillage génital
Cela fait 60 millions d’années que les papillons de nuit se font croquer par les chauves souris. Et que certaines espèces de Lépidoptères ont développé des organes auditifs pour entendre les cris d’écholocalisation de ces prédateurs et des systèmes de productions d’ultrasons pour les tromper.
Chez certaines espèces d’Arctiidés (écailles), les ultrasons sont produits par une timbale, organe situé sous le mésothorax, avec une membrane striée paire dont les déformations produisent les clics. Les sons sont perçus par le tympanum situé également sur le thorax. En plus d’interférer avec les signaux émis par les chauves souris, ces clics avertissent ces dernières de la toxicité du papillon (rôle aposématique).
Akito Kawahara et ses collaborateurs (université de Floride, États-Unis) ont étudié le cas des Sphingidés (sphinx), sur le terrain (70 sites de 32 pays) et au labo (700 individus soumis à des attaques de sérotines brunes Eptesicus fuscus). Sur 124 espèces examinées, presque la moitié émettent des sons de brouillage, sans valeur aposématique. Ceux-ci sont produits de façon originale chez les mâles, par le frottement de la surface externe des valves génitales sur le bord du dernier tergite de l’abdomen. Des enregistrements de ces signaux sont aussi efficaces que les individus vivants pour faire échouer l’attaque d’une sérotine brune (au labo).
L’équipe a également construit l’arbre de l’évolution des Sphingidés d’après les fossiles. Les premiers sphinx émetteurs d’ultrasons datent de l’Oligocène tardif, il y a 26 millions d’années et l’équipement complet est apparu deux fois dans la famille.
D’après, entre autres « Study reveals evolutionary history of hawkmoths' sonar jamming defense » par Stephenie Livingston. Lu le 5 mai 2015 à //phys.org/news/


Le bombardier en a dans le ventre, par Nathaniel Herzberg. Le Monde, 5 mai 2015.
À (re)lire : Les bombardiers, pétards mouillés des créationnistes, par Laurent Pélozuelo. Insectes n° 148 (2008-1).

Hôtel à insectes, le jeu des 7 erreurs

par Vincent Albouy
Nature ordinaire, nature extraordinaire !

Au Brésil, des moustiques transgéniques lâchés dans la nature contre la dengue. Le Monde, 5 mai 2015.

Avril
À cliquer

1031 Pauvreté partagée
En 2006, le décryptage complet du génome de l’Abeille domestique Apis mellifera (Hym. Apidé) crée la surprise : parmi les 11 à 15 mille gènes, bien peu sont liés à l’immunité et la détoxification.
Cette semaine, Genome Biology publie les résultats du décryptage des génomes de deux Apidés à la vie sociale plus simple et aux colonies renouvelées chaque année. Soit les Apidés Bourdon terrestre Bombus terrestris (européen très commun et auxiliaire de pollinisation sous serre) et Bourdon fébrile Bombus impatiens également très commun mais en Amérique du Nord).
Surprise : les génomes de ces insectes sont tout aussi pauvres en gènes liés à l’immunité. Le répertoire de ces gènes est très semblable entre l’Abeille domestique, les bourdons et même l’abeille découpeuse Megachile rotundata (Mégachilidé), solitaire.
Est donc infirmée l’hypothèse comme quoi les comportements sociaux évolués ont rendu inutiles le maintien ou la réplication des gènes liés à l’immunité et provoqué l’appauvrissement de cette partie du génome. Depuis toujours, les abeilles font face aux parasites et aux toxiques avec peu de gènes ; celles ayant atteint le plus haut degré de socialisation ont développé des défenses sociales en plus.
Article source

1030 L'avantage de la couleur métallisée
De nombreux insectes arborent des couleurs métallisées. Leur cuticule comporte des écailles microscopiques qui provoquent la diffraction de la lumière, d’où leur aspect irisé. Leur couleur change selon l’angle avec lequel on les regarde. À quoi leur sert le goniochromisme ?
À attirer le partenaire sexuel, à se distinguer des espèces mimétiques, à se protéger de l’échauffement… Thomas Pike, chercheur aux universités d’Exeter et de Lincoln (Royaume-Uni) a éprouvé l’hypothèse d’une défense contre la prédation.
Il a d’abord entraîné des cailles du Japon à becqueter l’image d’un coléoptère d’une couleur mate traversant l’écran tactile d’un ordinateur. Récompense : un ver de farine. Puis il a donné à l’insecte virtuel la couleur de la Mouche verte Lucilia sericata (Calliphoridé) et comparé le nombre de coups de bec donnés pile dans la cible. Les cailles ont besoin de 2,5 coups pour atteindre le coléo mat contre 4 pour le même métallisé. Et dans ce cas, l’oiseau touche l’écran plus loin de la cible.
Évidemment, cette manip a été conduite dans des conditions bien loin du milieu naturel et devra y être répétée.
L’adoption de couleurs iridescentes, fréquente dans le monde animal, a pu évoluer comme une façon d’échapper à la prédation.
Article source

1029 Bourrés, et pourtant…
Sentant leur fin proche, les malades, bourrés de parasites, se battent avec plus d’acharnement et gagnent quand même leurs combats. Ou alors, c’est qu’ils sont vieux – on ne peut pas les distinguer des jeunes – et ainsi plus expérimentés. Soit deux hypothèses pour tenter d’expliquer les résultats un peu étranges d’une série de combats organisés par David Vasquez et ses collaborateurs états-uniens.
192 combattants de l’espèce Odontotaenius disjunctus (Col. Passalidé) récoltés dans la nature, ont été opposés 2 par 2 (de poids égaux) pendant 3 minutes dans une petite caisse. Chacun a cherché à bouter l’autre et le vainqueur a été désigné par l’entomologiste observateur. Au gagnant comme au perdant, le même sort : la dissection et le comptage des individus hébergés du nématode Chondronema passali, parasite non mortel.
De façon surprenante, ce sont les coléos avec la plus faible infestation qui ont le plus souvent perdu face à un adversaire dépourvu du parasite. Le fait d’être bourré de nématodes (catégorie de 100 à 1 000 individus), soit « malade » ou vieux, ne modifie pas les chances du combattant.
Article source (avec illustrations)
NDLR : les Passalidés sont des Coléoptères saproxylophages subsociaux qui exploitent le bois pourri au moyen de galeries. Mâles et femelles y vivent en compagnie de leur progéniture, qu’ils nourrissent, et défendent leurs terriers contre un congénère qui fait mine de l’envahir. On peut facilement les faire s’affronter au laboratoire. Odontotaenius disjunctus est une espèce familière en Amérique du Nord (Jerusalem beetle) ; c’est le seul Passalidé non tropical.

1028 Œil pour œil
Pourquoi certains papillons ont sur les ailes des taches rondes qui ressemblent à des yeux, appelées ocelles ? Une équipe anglaise a récemment réfuté qu’il s’agit là de mimétisme, le papillon prenant l’allure d’une tête de prédateur ; elle a conclu à l’exposition de formes colorées rebutant les éventuels prédateurs.
Des entomologistes finlandais (de l’université Jyvaskyla) défendent l’hypothèse du mimétisme, les résultats de cette manip à l’appui. Dans une grande cage, au sol, un écran d’ordinateur avec juste au-dessus un ver de farine. Une mésange charbonnière entre dans la cage ; l’écran fait défiler alors rapidement 5 images : une tête de chouette les yeux grands ouverts, la même les yeux clos, un papillon les ailes ouvertes avec des ocelles ressemblant à des yeux de chouette, le même aux couleurs inversées et le même avec les ocelles effacées.
Les mésanges ont réagi fortement au portrait de chouette yeux ouverts, et un peu plus à la photo du papillon à ocelles de chouettes. Les autres images ne les ont guère intéressées. Elles voient clairement dans les ocelles une chouette, oiseau friand de mésanges.
D’après « Study suggests fake eyes on butterfly wings mimic eyes of predators », par Bob Yirka. Lu le 8 avril 2014 à //phys.org/news/

1027 Recherche horizontale
Dans une prairie, les fleurs d’espèces différentes sont juxtaposées dans le même plan horizontal. Sur un arbre, les fleurs sont réparties sur toute la hauteur – et elles sont toutes pareilles. Pour un insecte floricole en quête de nourriture, le problème du choix n’est pas posé de la même façon. Fait-il la différence ?
Stephan Wolf et ses collaborateurs, de l’université Queen Mary de Londres (Royaume-Uni) ont soumis des Bourdons terrestres Bombus terrestris (Hym. Apidés) à des épreuves de mémorisation de fleurs artificielles. Celles-ci, caractérisées par une couleur par exemple, sont disposées côte à côte ou les unes en dessous des autres. Dans le premier cas, nos bourdons entraînés réussissent l’épreuve à plus de 90 %. Dans le second, toujours en dessous de 70 %. Et ceci indépendamment de la couleur ou de la conformation de la fleur artificielle.
Les bourdons se comportent donc différemment et tout se passe comme si ils mettaient beaucoup d’application à se souvenir des différentes fleurs butinées dans une prairie et ne se cassaient pas la tête à propos de fleurs d’arbres, qu’ils « savent » invariables en fonction de l’altitude.
D’après, notamment « Bumblebees differentiate flower types when arranged horizontally but not vertically », lu le 7 avril 2015 à www.sciencedaily.com/

1026 Myrmécologie spatiale
Après le premier vol en 1947 de drosophiles, nombreux furent les insectes cosmonautes (voir l’Épingle « Entomologie spatiale ». Aujourd’hui, ce sont des fourmis Tetramorium caespitum (Hym. Formicidés) qui tournent autour de la Terre dans la Station spatiale internationale.
Le but immédiat de la manip : voir comment elles se débrouillent en absence de gravité. Dans leur nid artificiel, une porte s’ouvre sur un terrain à explorer à la recherche de ressources alimentaires. Sur terre, elles font ça très bien et leur travail collectif, sans régulation centrale, est efficace. Chaque individu communique par des signaux chimiques et tactiles avec ses congénères.
Dans le laboratoire en orbite, elles hésitent, parcourent des chemins plus longs ; elles peuvent se retrouver à flotter en l’air mais se raccrochent habilement au substrat. Leurs efforts pour rester les tarses en contact avec l’aire à explorer interfèrent avec ceux qu’elles doivent faire pour assurer les communications avec les autres fourmis. D’où leur maladresse générale.
Le but sous-jacent de la manip : améliorer les micro-robots appelés à travailler en essaims et en apesanteur.
D’après « Ants in space find it tougher going than those on Earth», lu le 1er avril 2015 à //phys.org/news/
Image : Rick Mastrachio, astronaute de la NASA, observe les fourmis.  

1025 Au jardin
Au début de 2014, 30 pièges Malaise ont été confiés à des particuliers, qui les ont installés dans leur jardin et relevés toutes les semaines. Ceci dans le cadre du programme BioScan (Biodiveristy Science: City and Nature), piloté par le muséum d’histoire naturelle de Los Angeles (Californie, États-Unis).
Les Diptères Phoridés récoltés ont été confiés à Emily Hartop, laquelle a examiné les genitalia de 35 000 individus. Et découvert 30 espèces nouvelles. Celles-ci ont été nommées d’après les noms des particuliers participants au programme.
Les Phoridés sont de petites mouches qui ont la particularité de s’enfuir en courant plutôt qu’en s’envolant. Les modes de vie sont très divers : parasitoïdes, décapiteuses, mycophages, nécrophages… Ceux des espèces révélées par BioScan sont tout à fait inconnus.
Les pièges ont capturé bien d’autres insectes, que d’autres entomologistes sont en train d’examiner. Ils révèlent une richesse entomofaunistique ordinaire insoupçonnée.
D’après, entre autres, « 30 New Species of Flies Discovered in Los Angeles » par Deborah Netburn. Lu le 30 mars à www.sci-tech-today.com/
Emily Hartop raconte son travail dans une longue page de blog (en anglais).
Une planche de genitalia http://research.nhm.org/bioscan/bioscanbuzz/wp-content/uploads/2015/03/30newSpeciesReduced.jpg
Un piège Malaise



1024 Chasseurs à réaction, pas seulement
Les libellules sont de sacrés chasseurs. L’imago stationne sur une tige jusqu’à l’apparition dans son paysage d’une proie volante. Il s’envole alors brusquement, la rattrape et l’embrasse de ses 6 pattes velues. Cela lui prend une demi-seconde, pas plus, et il n’est bredouille que dans 5% des cas. Pour les odonatologues, jusque-là, ces performances sont permises par une vision hors norme – de très gros yeux et un champ de vision de presque 360° – reliés aux centres nerveux par des neurones très rapides. Sa tête reste orientée vers elle alors que son corps bouge indépendamment, pour se placer au mieux pour la capture, s’adaptant
à chaque changement de vitesse, de cap, d’altitude… de sa proie.
Pour Mischiati et ses collaborateurs (Institut Howard Hughes en Virginie, États-Unis), beaucoup des mouvements de la libellule en chasse sont indépendants de ceux de l’insecte poursuivi, notamment ceux nécessaires à la maintenir sur une trajectoire passant en dessous de celle de sa proie, sans doute pour réduire les risques d’être repérée. Et la libellule anticipe dans une certaine mesure les manoeuvres de sa proie, performance « intellectuelle » que l’on croyait réservée à des vertébrés.
Leur travail a consisté à enregistrer, au moyen de caméras à très haute fréquence de prise de vues, les mouvements des proies et de la tête et du corps (munis de petits réfl ecteurs) de libellules en chambre de vol. Moyennant l’installation de fonds « naturels » et un éclairage très puissant, les libellules ont accepté de se plier à l’exercice.
À partir des images obtenues, ils ont établi la position exacte de l’image de la proie dans l’oeil de la libellule, qui reste toujours proche du centre, zone d’acuité maximale. Les écarts sont remarquablement compensés et l’oeil se place d’avance là où la vision de la proie sera la meilleure. Sans doute le biais expérimental est-il important. En nature, les libellules ont affaire à des insectes plus rapides et moins complaisants que les drosos d’élevage ou les mouches artifi cielles de l’expérience. Et les réactions simples et directes jouent-elles un rôle bien plus important.
D’après, entre autres, « Forget lions, Dragonfl ies are the world's deadliest hunters: Insect is four times more likely to catch its prey than big cats », par Sarah Griffi ths. Lu le 10 décembre 2014 à www.dailymail.co.uk/

1023 Dédoublement
Parmi les pucerons (Hém. Aphidoidea), insectes à la vie compliquée s’il en est, il en est un, Paracletus cimiciformis, au cycle particulièrement alambiqué – mais pas au point d’échapper à la description. Le cycle prend 2 ans. Sur l’hôte primaire,
le pistachier térébinthe, le premier été voit se succéder quelques générations de virginipares, de 3 formes différentes, qui vivent en gallicoles sur les feuilles. À l’approche de l’automne, les ailées se portent sur les racines de graminées, hôtes secondaires, et y engendrent des individus (virginipares toujours) de 2 formes, des rondouillardes vert olive (découvertes très récemment) et des plates blanchâtres (qui s’engendrent les unes les autres…), qui vivent là en association avec des fourmis Tetramorium jusqu’à l’été. Les radicicoles blanchâtres produisent deux types d’ailées : les unes émigrent vers d’autres graminées tandis
que les autres reviennent sur le pistachier et engendrent 2 formes de plus, des mâles et des femelles qui s’accouplent et donnent naissance, au travers de l’oeuf d’hiver, à une nouvelle génération de gallicoles.
Les pucerons sont effectivement capables d’exister sous plusieurs formes avec un même génome. Cette espèce va plus loin que ce qui était connu. Adrian Salazar et ses collaborateurs (université de Valence, Espagne) viennent en effet de montrer que les 2 formes de radicicoles, ont des rapports aux fourmis très différents.
Classiquement et dans une relation de mutualisme, une puceronne verte, occupée à ponctionner la racine, chatouillée par une fourmi, fait sourdre de son anus une goutte de miellat, provende des fourmis. Une puceronne pâle et plate aura parfois cette réaction mais le plus souvent se laissera transporter par la fourmi jusqu’à son nid, qui la déposera parmi le couvain. Où elle se mettra à piquer les larves de son hôte pour s’alimenter de leur hémolymphe. Comportement prédateur entomophage.
Les individus de cette forme blanchâtre trompent infailliblement les fourmis par un déguisement chimique : leur cuticule sécrète des hydrocarbures qui sentent exactement comme ceux de leurs larves. Un cas de mimétisme agressif et de plasticité extrême du comportement alimentaire, de la part de clones censés être identiques. Une vie
complexe de puceron et de fourmi, entre coopération et agression, où il reste beaucoup à comprendre.
Article source : Aggressive mimicry coexists with mutualism in an aphid, Adrián Salazar et al., PNAS, 112(4), 2014,
À (re)lire : Les pucerons, par Alain Fraval. Insectes nos 141 et 142, 2006(2) et (3)

1022 Troublantes queues
Les ailes postérieures du Papillon lune américain Actias luna (Lép. Saturniidé) sont prolongées en arrière par des « queues ». Elles ne jouent aucun rôle dans l’attractivité sexuelle et il est diffi cile d’y voir des appendices améliorant les performances de vol des imagos. Cette espèce fait partie de la moitié de la gent lépidoptérique qui ne possède pas d’organe acoustique et ne perçoit donc pas les cris d’écholocation des chauves-souris, leurs grands ennemis.
D’où l’hypothèse, posée – et vérifi ée – par une équipe d’entomologistes états-unien : ces queues servent au papillon à troubler la chauve-souris qui s’apprête à le gober. Pour ce faire, ils ont pris 162 individus ; à 75 d’entre eux ils ont coupé les queues. Puis ils les ont attachés un par un au plafond et lâché dans le labo un Vespertilion brun. 65% des papillons intacts ont échappé à ses crocs, contre 15% des équeutés. Le visionnage des vidéos à très haute fréquence des attaques a montré que dans plus de la moitié des cas, la chauve souris s’égare et se précipite sur les queues, dont l’écho radar lui paraît probablement plus intéressant.
Au programme de l’équipe, l’étude d’autres espèces à queues.
D’après « Study shows long tail on luna moth helps to thwart bat attacks », lu le 17 février 2015 à //phys.org/news/.
À (re)lire : Actias luna, le Papillon lune américain, par Hervé Guyot. Insectes n°85, 1992(2).


Pour éviter les bouchons, les fourmis accélèrent, par Hervé Morin. Le Monde, 27 avril 2015. (abonnés)
[Formica pratensis]

Abeilles et bourdons sont irrésistiblement attirés par les pesticides qui les tuent,
par Stéphane Foucart. Le Monde, 23 avril 2015.

3 Conférences sur les insectes et les araignées
les 25-26-27 avril à 15 h à la Cité des Insectes à Nedde
Pendant la résidence entre le photographe Philippe Blanchot et deux chercheurs au muséum d'histoire naturelle de Paris Claire Villemant, spécialiste des hyménoptères (abeilles, guêpes, fourmis) et Christine Rollard spécialiste des araignées :

Atlas dynamique des libellules d'Ïle-de-Fance.
Natureparif/OPIE.

La NASA s’attaque aux moucherons…
aeroVFR, 13 avril 2015

Avis
de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation,
de l’environnement et du travail
relatif à « la valorisation des insectes dans l’alimentation et l’état des lieux des
connaissances scientifiques sur les risques sanitaires en lien avec la consommation des
insectes».
Pdf

Une bourgade d'abeilles solitaires dans une vigne
, par
Vincent Albouy.
Mars
À cliquer

1021 Vert luisant
On l’a redécouvert récemment, dans le centre du Brésil. Neonothopanus gardneri (Agaricale) est un champignon luminescent, le plus brillant des 71 espèces reconnues de champignons lumineux. Il luit vert (longueur d’onde 530 nm), la nuit, grâce au système luciférase-luciférine, connu notamment chez les insectes noctiluques.
Sa lumière, qui lui coûte de l’énergie, ne lui sert sûrement pas à attirer un partenaire sexuel. L’installation, au pied des palmiers et durant 5 nuits, de faux N. gardneri en plastique équipés de LED a conduit à l’hypothèse du piège lumineux. Pourvu que les LED émettent le même vert que l’original, ces copies se retrouvent fréquentées par des staphylins, des punaises, des mouches, des guêpes et des fourmis. Autant d’agents capables de disséminer les spores du champignon dans un milieu où le vent ne souffle pas.
D’après notamment « Glowing mushroom attracts insects », par Emily Conover. Lu le 19 mars à news.sciencemag.org/
Photo

1020 Familles nombreuses comme avant
Leur nombre n’a pas varié, car aucune ne s’est éteinte. C’est la conclusion du travail de Dena Smith et Jonathan Marcot (universités du Colorado et de l’Illinois, États-Unis) qui a consisté à réexaminer tous les fossiles de Coléoptères accessibles par la littérature et les bases de données. Soit 5 553 spécimens de 221 lieux de collecte, surtout des dépôts lacustres et des gisements d’ambre. Soit un suivi sur 300 millions d’années, depuis le Permien.
Dans cette collection, les 4 sous-ordres actuels et 148 des 214 familles de Coléoptères sont représentés.
On a nommé plus de 380 000 espèces de cet ordre, le plus vaste du monde vivant, dont 90% appartiennent aux Polyphaga, groupe remarquable par la diversité des mœurs et régimes alimentaires de ses ressortissants. Essentiellement, les Archostemata sont xylophages, les Myxophaga algophages et les Adephaga carnassiers. Ces trois sous-ordre ont connu leur apogée (en termes de diversification) au début du Trias.
C’est depuis le Jurassique que les Polyphaga dominent. Il a été avancé que, pendant le Crétacé moyen, ils ont vécu une diversification en co-évolution avec celle des plantes à fleurs. Elle n’apparaît pas si l’on retire de l’examen les spécimens de l’ambre, formé en abondance à cette époque. On ne constate pas non plus, à l’échelle de la famille, de disparition lors de l’extinction Crétacé-Tertaire.
À quoi les Coléoptères Polyphaga doivent-ils leur résilience très remarquable ? À leur faculté de se déplacer pour échapper aux modifications de l’environnement, à une richesse spécifique très élevée au départ ? Une étude au niveau de l’espèce est indispensable. Il faudra faire sortir les fossiles des tiroirs où, en grande majorité, ils dorment sans avoir été décrits…
Article source (en anglais, gratuit)

1019 Essais en vol de l’Ax3
On sait depuis longtemps que l’aile des insectes n’est pas reliée directement au tegument du thorax. Des petites pièces, dites sclérites axillaires, s’articulent entre la base des nervures et la plaque humérale : 1 sclérite axillaire chez les Paléoptères, plusieurs chez les Néoptères qui sont capables de replier leurs ailes au-dessus de l’abdomen. On croyait le 3e sclérite (Ax3) et le muscle qui y est relié dédiés au pliage de l’aile postérieure (membraneuse) chez les Coléoptères.
Michel Maharbiz, à la tête d’une équipe répartie entre la Californie et Singapour, vient de mettre en évidence son rôle déterminant dans le vol : il permet les virages.
Pour ce faire, il a fallu un peu de matériel. D’abord un très gros insecte costaud, Mecynorrhina torquata (Col. Cétoniiné), et coopératif (il aime s’envoler). Puis une goutte de colle pour lui fixer sur le pronotum un circuit électronique avec radiorécepteur, batterie et 6 électrodes à brancher sur le système nerveux et les muscles alaires. L’action se passe, surveillée par 8 caméras, dans une pièce.
Pique-t-on les électrodes postérieures précisément dans les muscles Ax3, on se retrouve capable de commander des virages à gauche et à droite au Zombiptère « libre » (non relié par un fil). Ce qui n’était pas du tout le cas dans les essais précédents, alors qu’on savait déclencher le décollage et l’atterrissage.
Une première remarquable et un grand succès du partenariat entre ingénieurs et scientifiques, a dit en substance M. Maharbiz.
D’après « Cyborg beetle research allows free-flight study of insects », lu le 16 mars 2015 à //phys.org/news/
Photo de la cétoine asservie en vol  

1018 Prompt rétablissement
La stabilité en vol des petits insectes étonne. Si l’on bouscule une drosophile, comment réagit-elle ? La rapidité de sa réponse et du rétablissement de sa trajectoire étonne.
Tsevi Beatus et ses collaborateurs de l’université Cornell à New York ont filmé avec une camera à haute fréquence (8 000 images/s) le vol de drosos équipées d’un aimant (qui ajoute 20% à leur poids). L’enceinte de vol est placée entre deux bobines d’Helmholtz. Une courte impulsion fait basculer la mouche sur le côté ; elle réagit à un roulis imposé de 60°en moins de 5 millisecondes et reprend sa course normalement au bout d’une trentaine de seconde, soit le temps de 8 battements d’ailes. Le rétablissement est opéré par des torsions dissymétriques des ailes.
La réponse est 5 fois plus rapide que la réaction de sursaut provoquée par un stimulus visuel. C’est grâce aux commandes électriques et aux calculateurs embarqués que les avions de chasse corrigent les perturbations bien avant que le pilote les perçoive.
D’après « Magnet test shows mastery of flies», lu le 11 mars 2015 à www.belfasttelegraph.co.uk/

1017 S’envoyer en l’air…
…Et atterrir au bon endroit. Chez les insectes sauteurs la moindre dissymétrie dans l’effort de chaque patte doit faire rater la cible. Chez les cicadelles, notamment, on a montré que les deux pattes arrière donnent des impulsions parfaitement égales.
Les jeunes larves de la Mante religieuse Mantis religiosa (Mant. Mantidé), aptères et aux pattes postérieures grêles, sont capables de sauter sur une brindille. Ce qu’on fait 58 d’entre elles, pour 381 prestations filmées – avec une caméra à haute fréquence - consistant à décoller d’une plateforme et à se retrouver agrippées au bâtonnet planté en face, à quelques longueurs. Après examen de la cible, la mante décolle un peu de travers, exprès, et ajuste en l’air son moment cinétique, qu’elle « dépense » petit à petit, pour arriver bien en face et bien parallèle au bâtonnet. Elle joue pour ce faire d’abord, au moment de l’appel, sur la torsion de son abdomen par rapport au thorax ; durant le saut elle déplace ses segments abdominaux, ses pattes ravisseuses puis ses pattes arrière sauteuses pour se donner l’attitude adéquate. Le tout en moins de 80 ms.
Soumis à la même épreuve de saut, les individus dont on a rigidifié l’abdomen se cognent la tête sur le bâtonnet et se retrouvent par terre.
La mante prévoit-elle à l’avance cette gestion du moment cinétique ou la maîtrise-t-elle au fur et à mesure du saut ? Comment y parvient-elle à cette vitesse ? Les roboticiens sont très intéressés par ces travaux menés à l’université de Cambridge (Royaume-Uni).
D’après « Baby mantises harness mid-air 'spin' during jumps for precision landings ». Lu le 5 mars 2015 à //phys.org/news/
À (re)lire : Ils sautent ! Par Alain Fraval. Insectes n° 167 (2012-4).  

1016 À hue et à dia
On travaille sur les insectes asservis par un dispositif électronique embarqué (nos Zombiptères) depuis plusieurs années, à l’initiative de l’Armée états-unienne, et les annonces se succèdent, de succès plus ou moins éphémères. Chaque étape repérée fait l’objet d’une Épingle, établie sur la foi des communiqués de presse (mot-clé Zombiptère) et rédigée généralement d’un ton un peu sarcastique. On a ainsi accueilli depuis 2006 chez cet ordre douteux le Sphinx du tabac, la Cétoine verte du pêcher, la Blatte souffleuse de Madagascar, la Blatte américaine et la sud-américaine Blaberus discoidalis.
Avec l’aimable participation des 2 cafards susmentionnés et sous la houlette de Hong Liang (Texas A&M University, États-Unis), une équipe d’« ingénieurs » vient de mettre au point un nouveau mode de pilotage. L’équipement reste classique : l’insecte porte l’électronique de télécommande et de génération du signal (1,5 g) et la pile (1,5 g en plus) sur son dos. Abandonné le branchement des électrodes sur les cerques ou les antennes : la blatte s’y habitue très vite et n’obéit plus. La « greffe » se fait au niveau du ganglion du prothorax – qui commande les pattes antérieures.
Les épreuves se déroulent sous l’œil d’une caméra et les participants bénéficient de périodes de repos. Le cafard est lâché, il cavale, l’opérateur appuie sur le bouton « à gauche ». Une impulsion de 2 V au plus, 1 à 20 KHz, est envoyée dans le ganglion droit. Les 3 pattes de ce côté sont désynchronisées et la bête oblique à gauche. Ceci dans 60% des cas (70% si le cafard est attaché).
Il y a donc encore du boulot. Et puis, cet insecte augmenté ne sera d’une quelconque utilité (recherche dans les ruines ou les endroits inexplorables de bâtiments ou d’installations, espionnage…) que s’il renseigne sur sa position de façon à ce qu’on puisse le piloter autrement qu’à vue. Soit au moins une boussole, un gyroscope, un GPS.
Article source (gratuit, en anglais)
Image d’un individu de Blaberus discoidalis équipé 

Nature ordinaire, nature extraordinaire ! Le blog de Vincent Albouy. Dernier article : Difficile réveil printannier pour les abeilles mellifères.

Objectif Mitaraka : l'arsenal entomologique.
Le Monde, 5 mars 2015.

Pourquoi il ne faut pas piéger le frelon asiatique
, par Cécile Cazenave. Terra eco, 3 mars 2015.

Le paludisme, une longue histoire de sexe
, par Nathaniel Herzberg. Le Monde, 3 mars 2015.

Février
À cliquer

1015 Faux souvenirs
Il est relativement facile de faire naître des faux souvenirs chez Homo sapiens, notamment sur le divan du psychanalyste ou dans les locaux de la police (voir ici). Il est également simple de les faire naître et de les mettre en évidence chez le Bourdon terrestre, qui vient d’être reconnu comme le premier animal à partager cette faculté (de mélanger des souvenirs) avec l’Homme. Bombus terrestris (Hym. Apidé), on le sait depuis longtemps, possède de grandes capacités de mémorisation des odeurs, des couleurs, des formes, des trajets…
Lars Chittka et Kathryn Hunt (Queen Mary University, Londres, Royaume-Uni) on entraîné des bourdons à s’attendre à recevoir une récompense de leurs visites successives d’une fleur (artificielle) jaune et d’une autre (idem) décorée de cercles noirs et blancs. Puis, les jours suivants, ils leur ont présenté trois fleurs, les deux citées plus une nouvelle variété « mixte », avec des cercles jaunes et blancs. Les bourdons ne se trompent pas le premier jour mais au-delà (jusqu’à 3 jours), ils vont dans la moitié des cas vers la fleur nouvelle, qu’ils n’ont jamais vue durant leur entraînement.
Cette erreur, le mélange de deux souvenirs, de leur mémoire à long terme n’est pas un bug mais traduit une adaptation utile : cette mémoire – particulièrement limitée par la petite taille de leur cerveau – efface en premier les souvenirs précis d’objets individuels pour ne conserver que les caractéristiques servant à les classer.
Nos chercheurs entreprennent de pister les bourdons par radar tout au long de leur vie imaginale pour comprendre comment ils accumulent et traitent les informations reçues.
D’après « Bumblebees make false memories too », lu le 26 février 2015 à phys.org/news/

1014 La cigale muette qui chante
La plupart des cigales mâles cymbalisent : grâce à leur abdomen profondément modifié (cymbales, tympan…), ils produisent des cliquetis puissants (et énervants). Certaines espèces stridulent, qui sont dotées d’un appareil à friction à la manière des grillons et sauterelles. Dans le genre Karenia (Hém. Cicadidés), du Sud-Est asiatique, aucun organe acoustique n’est présent en apparence, ce sont des cigales dites muettes.
Pourtant, elles chantent – on l’a observé récemment -et ne sont pas sourdes : on attire les mâles facilement en claquant des mains ou en entrechoquant des bambous.
Changqing Luo et son équipe (Northwest A&F University, Chine) ont étudié le phénomène sur K. caelatata, enregistrant et analysant le son produit, examinant les détails morphologiques, pratiquant des ablations de la nervure costale de l’aile antérieure, et repassant les stridulations à des femelles en cage.
Le chant – qui est bien un appel - est ainsi produit : le mâle relève son abdomen et ouvre et referme rapidement ses ailes antérieures dont la base est coincée dans une rainure ad hoc du scutellum tandis que la nervure costale (très sclérotisée) frotte bruyamment sur l’opercule considérablement modifié (expansion en forme de lame du thorax qui recouvre les tympans chez les cigales « normales »).
C’est la première mention d’un tel mécanisme sonore. Reste à trouver quel avantage, par rapport aux cigales « classiques », a pu être à l’origine d’une modification aussi importante.
Article source (en anglais, gratuit)
À (re)lire et à (ré)écouter : Stridulations 

1013 Petit coin
Où déféquer en société ? Pour les abeilles, même les plus jeunes, c’est au fond du jardin, par vol spécial. Chez les fourmis, on a des dépotoirs à l’extérieur du nid ou dans des chambres spéciales, où l’on va déposer déchets divers et cadavres – et parfois des ouvrières spécialisées s’en occupent. Dans certains cas, les fèces peuvent être utiles et on ne les gaspille pas : les fourmis coupeuses de feuilles en engraissent leurs cultures de champignons, des termites les utilisent comme matériau de construction. En général, cette matière est réputée dangereuse, source potentielle d’infection.
La Fourmi noire des jardins Lasius niger (Hym. Formicidé) va, elle, au (petit) coin. À preuve un dispositif expérimental construit et observé par Tomer Czaczkes et ses collègues de l’université de Ratisbonne (Allemagne) constitué de 21 nids en plâtre formés de 4 chambres carrées autour de l’orifice d’accès depuis l’aire d’affouragement. Dans chacun, 150 à 300 individus nourris d’une solution sucrée colorée en bleu ou en rouge.
Au bout de 2 mois, on distingue des taches colorées (en bleu ou rouge) bien individualisées, la plupart dans les coins. Aucun débris, aucun cadavre sur ces lieux : ce sont les « toilets » des ouvrières.
D’où toute une série de questions à creuser : pourquoi ne pas aller dehors (c’est dangereux, c’est fatiguant) ? ; pourquoi conserver ces fèces (source de sel, de micro-nutriments ou de champignons consommés au fur et à mesure) ? ; pourquoi aller au coin (par stygmergie, on s’y sent bien serrées avec ses congénères) ?
Article source (gratuit, en anglais)

1012 Sur la piste des fourmis
La Fourmi de feu tropicale Solenopsis geminata vit dans toutes les régions tropicales de la Planète. Ses nids sont souterrains, comportant une ou plusieurs reines, différentes tailles de soldates et d’ouvrières ainsi que le couvain. Elle se fait détester par ses piqûres très douloureuses – d’où son nom – et aussi par les dégâts qu’elle inflige aux systèmes d’irrigation – elle agrandit les trous des goutte à goutte. C’est aussi un ravageur redouté : granivore, la fourmi est aussi éleveuse de cochenilles…
Andrew Suarez et ses collaborateurs, entomologistes états-uniens, viennent de décrire comment cette espèce a conquis le monde à partir du Mexique, d’une région au sud-ouest de Mexico précisément. C’est là que la diversité génétique est maximale. Chacune des 192 populations d’autres pays s’est révélée comporter un sous-ensemble de cette diversité, renseignant sur l’expansion de l’envahisseuse.
Cette expansion s’est faite au XVIe siècle et est l’œuvre des Espagnols. Ceux-ci venaient d’établir une route maritime entre Acapulco au Mexique et Manille aux Philippines, port qui fonctionnait comme un hub pour desservir toute l’Asie du Sud-Est.
Les galions peu chargés ou à vide étaient stabilisés par du ballast, soit de la terre prélevée près du port, qui était déchargée à l’arrivée. Terre prélevée et transportée avec les nids de la Fourmi de feu.
D’après « Tropical fire ants traveled the world on 16th century ships », lu le 18 février 2015 à //phys.org/news/

1011 Les esclaves se rebiffent
Tout se passe bien en général dans le monde de l’esclavagisme durable. Manque-t-on de main d’œuvre ? Une expédition chez les voisins rapporte un lot d’individus qui sont mis au travail à domicile de leur émergence jusqu’à leur mort. Les maîtres ne savent rien faire d’autre que de mener à bien l’approvisionnement en esclaves ; ceux-ci font tout le reste : pouponnage, nourrissage des petits et des grands, ménage et aménagement – et ceci sans aucune vie sexuelle ni parentalité.
D’ailleurs les esclaves se croient chez eux et se démènent pour leurs ravisseurs sans états d’âme. En effet, imprégnés à leur émergence des hydrocarbures cuticulaires de leurs hôtes, ils baignent naturellement dans l’ambiance (chimique) de leur demeure d’adoption, qui est résolument au travail continu et assidu.
Pourtant le dulotisme tranquille a une exception. On la trouve le long de la côte est de l’Amérique du Nord, dans la litière des forêts mixtes. Temnothorax longispinosus (Hym. Formicidé) – qui nidifie dans des tiges creuses ou des glands - est régulièrement réduit en esclavage par Protomognathus americanus (autre fourmi). Couramment, les ouvrières se jettent sur le couvain de leur hôte et le mettent en pièce ; elles ne s’attaquent pas aux imagos, bien plus gros qu’elles.
Considérées du point de vue de l’évolution, ces « mutineries » posent un problème intéressant : l’effort (et les risques) qu’elles coûtent aux révoltées ne leur bénéficie pas directement. Elles ont pour résultat de réduire la pression exercée par les P. americanus sur leurs fournisseuses en maintenant bas leurs effectifs, ce qui augmente la probabilité que des nids (dispersés en fonction de la disponibilité en glands) leur échappent. Les rapts, opérations coûteuses, ne concernent en effet qu’un nid à la fois. 
L’étude précise sur le terrain de centaines de nids a corroboré cette hypothèse. Le résultat de ces rébellions est donc attesté mais leur mécanisme reste à découvrir.
D’après « Slave ants and their masters are locked in a deadly relationship », par Tobias Pamminger. Lu le 11 février 2015 à //theconversation.com/

1010
Hexaplégie réversible
Le Braconidé Dinocampus coccinellae pond dans la Coccinelle maculée Coleomegilla maculata. Sa larve, après avoir dévoré une partie des organes de son hôte, sort tisser un cocon et se nymphoser entre les pattes de la coccinelle. Celle-ci fait alors office de garde du corps de son parasitoïde jusqu’à l’émergence de celui-ci. Ce cas de manipulation est de découverte récente (2011) ; les mêmes entomologistes français, armés de puissants moyens de microscopie et outils de génie biomoléculaire, viennent d’en publier le mécanisme, original.
La femelle du Braconidé transmet lors de la ponte à la coccinelle un virus – qu’elle conserve dans ses ovaires – qui infecte son système nerveux et la paralyse. La coccinelle peut juste remuer un peu et dissuader d’éventuels prédateurs de la nymphe du Braconidé. Le virus n’est pas mortel. Si la coccinelle n’a pas été trop endommagée intérieurement par le grignotage de la larve, elle guérit de sa paralysie et reprend la vie active – avec une fécondité réduite cependant.
D’après « Study shows example of a parasite using a bioweapon to control host », par Bob Yirka. Lu le 11 février 2015 à //phys.org/news/
À (re)lire : Le Chlorion et autres manipulateurs, par Alain Fraval. Insectes n° 163 (2011-4).

1009 Dopage
Une dose de  5-hydroxytryptophane (précurseur de la sérotonine) dans la soupe et c’est la victoire assurée (dans 85% des cas) sur l’autre mâle (de même catégorie) enfermé avec soi dans une boîte de Petri, qui convoite l’unique goutte d’aliment présente. Le dopage ne fait pas de miracle : si l’on est plus petit que l’adversaire, on manifeste certes plus d’ardeur au combat mais on se fait éjecter.
En tous cas, on a bien le cerveau enrichi en sérotonine, comme le montre la dissection suivie d’une délicate préparation. C’est le résultat obtenu par l’équipe de John Swallow, qui étudie le rôle des monoamines en tant que neurotransmetteurs sur des cobayes très coopératifs, de l’espèce Teleopsis dalmanni (Dip. Diopsidé). Ces mouches sont non seulement remarquables par leurs yeux composés déportés au bout de pédoncules (qui portent les antennes) mais aussi par les combats ritualisés que se livrent les mâles. Des luttes qui s’engagent pour la place de repos, la femelle (tout un harem) ou la nourriture et qui se concluent par l’abandon du dominé.
D’après « Study on insect aggression and neurochemistry », lu le 27 janver 2015 à //phys.org/news/

1008L’ours, la fourmi et la cicadelle
Cela se passe au Colorado (États-Unis) où pousse, plus ou moins bien, Chrysothamnus viscidiflorus, une Astéracée aux fleurs jaunes, dite rabbitbush, abri prisé des oiseaux. La plante héberge divers phytophages dont la cicadelle Publilia modesta (Hém. Membracidé) aux ponctions très dommageables. La cicadelle est protégée de ses prédateurs et favorisée par la fourmi Formica obscuripes (Hym. Formicidé), laquelle reçoit pour son service du miellat.
En présence d’ours (Ursus americanus), le rabittbush prospère. En effet, ledit Ours brun a compris que les insectes constituent une source de protéines abondante et très profitable. Il éventre les nids de fourmis et se régale du couvain. S’adonnant à l’entomophagie, il couvre le tiers (en volume) de ses besoins alimentaires. Et faute de fourmis, les cicadelles se raréfient et le rabbitbusch croît sans entraves.
Cette cascade d’interactions trophiques a été mise en évidence (observations et expériences à l’appui) par Josh Grinath et ses collaborateurs (université d’État de Floride). Elle est plus ou moins évidente selon les années et les conditions climatiques. Elle risque de disparaître avec le style de vie adopté de plus en plus par les ours : fouiller plutôt les poubelles.
Article source (en anglais, gratuit) 



Bon plan pour tous les pollinisateurs
Grande campagne de financement participatif lancée par l'OPIE.

Les jardiniers amateurs menacent les insectes pollinisateurs,
par Stéphane Foucart. Le Monde, 19 février 2015

Contre la désertifiction, les termites,
par Nathaniel Herzberg. Le Monde, 10 février 2015.

Hécatombes dans les ruches : des abeilles forcées à butiner trop jeunes.
Le Monde, 10 février 2015.

Évolution de la répartition et des populations d'insectes
. VIIIe Rencontres entomologiques du Centre. Samedi 28 février 2015, à Blois. Renseignements : Christian Sallé
Janvier
À cliquer

1007
Souriez, vous êtes filmés
Le microscope électronique à balayage nous fournit des images très précises d’insectes très petits et au tégument surchargé en détails. C’est aussi spectaculaire qu’utile mais ces images sont fixes, car les sujets sont raides morts.
Pour éviter la dispersion du flux d’électrons, il faut placer les insectes (et autres animaux) dans le vide, ce qui les déshydrate inexorablement, et impose une fixation et une préparation fatales (et laborieuses).
Une équipe de microscopistes japonais vient de mettre au point un procédé qui maintient le sujet en vie – durant 2 heures au plus – et libre de ses mouvements. Le motif est trempé dans un surfactant (du simple Tween 20) puis irradié (le liquide est polymérisé), ce qui l’enveloppe – avec ses moindres détails - dans un film transparent et lui constitue une sorte de scaphandre – très collant – qui l’isole du vide ambiant (de 10-5 à 10-7 Pa) une fois dans le microscope. En plus, le film reste dépourvu de toute charge électrostatique, tant que le sujet est vivant.
Premiers insectes filmés, la larve de 4e stade du Moustique commun Culex pipiens (Dip. Culicidé) et l’imago du Criocère du muguet Lilioceris merdigera (Col. Chrysomélidé).
Article source (en anglais, gratuit)

1006
À la sortie des urnes…
…Les éclaireuses reviennent au nid et y répandent la nouvelle de l’existence d’un réservoir de nectar délectable autant que roboratif. Les ouvrières alléchées s’y précipitent et glissant sur les bords de l’urne sont précipitées dans le fond où elles seront digérées. Le piège est tendu ou pas, alternativement.
L’urne est celle de la plante carnivore Nepenthes rafflesiana, indigène de Bornéo. Elle est glissante ou pas, selon grosso modo qu’il fait humide ou sec. Les ouvrières – de plusieurs espèces de fourmis – sont ainsi capturées par lots de temps en temps et non pas une par une de façon continue. Globalement, la plante bénéficie ainsi d’un apport protéique augmenté de 30% ; les fourmis profitent d’une source de nectar, au prix d’un certain dégraissage de leurs effectifs…
Article source (en anglais, gratuit)

1005
Les soldats ont le cerveau plus petit

Les fourmis Pseudomyrmex (Hym. Formicidés) vivent en étroite association avec l’acacia corne de bœuf, arbre dont elles dépendent pour la nourriture et l’abri, et qu’elles défendent contre les animaux herbivores et les plantes adventices. C’est un exemple très connu de mutualisme entre insecte et végétal, présent dans tous les manuels.
Ces mêmes fourmis viennent de fournir une réponse à une question disputée. On sait depuis longtemps que les individus vivant en colonies ont des cerveaux plus gros dans les colonies les plus populeuses. Est-ce pour faire face à l’augmentation des connexions sociales (social brain hypothesis = SBH) ou en relation avec la spécialisation de certains individus (task specialization hypothesis = TSH) ?
Une équipe du Smithsonian Tropical Research Institute à Panama a trouvé dans ces fourmis de l’acacia un matériau d’étude adéquat. Leurs colonies sont de taille variable. Dans les plus petites, tout le monde fait tout, affouragement et défense. Dans les grosses, la plupart des ouvrières évoluent sur les feuilles où elles procèdent à la récolte (pseudo nectar, miellat de pucerons spécifiques…) tandis que les autres, soldats, restent à la base du tronc surveillant les assaillants. Effectivement, quand la taille de la colonie augmente, le cerveau grossit – celui des récolteuses. Tandis que celui des soldats, aux tâches sans doute plus simples, ne varie pas.
D’après « Field study suggests brain size in ants adheres to specialization hypothesis », par Bob Yirka. Lu le 7 janvier 2015 à phys.org/news/
Chez les Pseudomyrmex, au moins, l’hypothèse TSH est valable.
À (re)lire Les défenses des plantes, par Jacques Huignard. Insectes n° 168 (2013-1) p. 7.
et Comment un arbre mène des fourmis à l’esclavage, par Pierre Barthélémy. Le Monde, 20 novembre 2013.

1004 Chasseuses de têtes
La famille des Phoridés (Diptères), bien caractérisée morphologiquement, regroupe des espèces aux modes de vie très variés, de parasitoïdes à détritiphages. Quelques Métopininés (dans les genres Apocephalus et Pseudoaceton notamment) se développent dans la tête de fourmis, laquelle finit par tomber – ce sont les « mouches décapiteuses ».
D’une autre sous-famille, les Phorinés, 7 espèces de Dohrniphora (d’Amérique tropicale) coupent également la tête de fourmis, en s'y prenant tout autrement.
Ce sont les femelles qui procèdent. Elles arrivent au vol, accompagnées d’un mâle, passent et repassent au-dessus de grosses fourmis Odontomachus blessées, se posent ; le mâle s’en va. Suivent quelques minutes d’inspection, sans doute pour évaluer le degré d’infirmité de la proie, avec tiraillements de pattes et d’antennes. Si la fourmi est encore réactive, la mouche va s'occuper d'une autre blessée.
Puis la femelle grimpe sur la fourmi et, avec sa très longue trompe terminée par une lame coupante (l’épipharynx), lui attaque le cou, découpant la membrane tégumentaire puis, plus en profondeur, l’œsophage et la chaîne nerveuse. La décollation achevée – ce qui lui prend au moins 8 minutes -, elle traîne la tête sur plusieurs mètres dans la litière.
La femelle opère ainsi pour procurer la nourriture nécessaire à sa larve (1 par tête) ; elle en a sans doute également besoin pour mûrir ses ovocytes.
Si le travail est dur, la matière ne manque pas : les guerres entre colonies d’Odontomachus fournissent de gros effectifs de blessées, exploitées aussi par d’autres insectes.
Article source (gratuit, en anglais)
À (re)lire : Apocephalus borealis fait perdre la tête aux abeilles. Insectes n° 164 (2012-1)

1003 Entomophagie prophylactique
Consommer des méloés est dangereux mais ça peut payer. À l’état adulte, ces gros Coléoptères (Méloïdés) se trainent dans l’herbe où ils ne passent pas inaperçus avec leur gros abdomen souvent découvert et leur livrée noire et rouge aposématique. Le prédateur risque gros en effet, l’insecte contient de la cantharidine, mortelle à dose modérée. Cette substance est aussi un antihelminthique et un antibactérien (et un aphrodisiaque).
La grande outarde Otis tarda a un régime omnivore, partiellement entomophage. À la saison des amours, les mâles paradant et les femelles les observant becquettent des méloés mais seuls les premiers les préfèrent parmi l’entomofaune ambiante et en choisissent les plus gros spécimens : le Méloé mélangé Berberomeloe majalis (jusqu’à 45 mm) et Physomeloe corallifer. Des observations précises menées en Espagne découle l’hypothèse que leur comportement alimentaire ressortit à la sélection sexuelle : il augmente leur succès reproducteur.
Durant la parade, le mâle piétine, aboie et – comportement très original - écarte les plumes blanches autour de son croupion de façon à bien exposer son cloaque. Ce dernier fait l’objet d’un examen rapproché et attentif de la part de son éventuelle future partenaire. Madame exigerait un cloaque blanc c’est-à-dire notamment sans trace de diarrhée trahissant un mauvais état de santé.
Il sera très difficile de le prouver mais tout porte à croire que les outardes mâles avalent des méloés comme des pilules contre les désordres digestifs et les maladies sexuellement transmissibles. Ils pratiquent ainsi une automédication – non dépourvue de risques d’intoxication - de façon à se présenter comme sains aux femelles qu’ils convoitent et qui sont extraordinairement suspicieuses.
Article source : Males of a Strongly Polygynous Species Consume More Poisonous Food than Females. Carolina Bravo et al. En ligne (gratuit) sur www.plosone.org/

1002 Cette très chère drosophile
S’il est un insecte souvent vedette d’une Épingle, c’est bien la Mouche du vinaigre Drosophila melanogaster. C’est en effet la bestiole à tout faire des chercheurs de diverses disciplines qui lui font subir toutes sortes de traitements, sur leur paillasse et dans l’espace. Elle est très bon marché, bien définie, petite, vite reproduite (et ne crie pas).
Beaucoup de ces chercheurs très pointus ne savent sans doute pas combien elle a de pattes. Pour qui voudrait savoir comment une droso se construit, de l’œuf à l’insecte parfait, un entomologiste anglais a publié un l’ouvrage de synthèse à vocation didactique The Making of a Fly: The Genetics of Animal Design, en 1992 chez Blackwell. Dans ce livre de quelque 220 pages, assez ardu, peut-être un petit peu ancien déjà, tous les secrets du développement pré-imaginal de la mouche et ses bases génétiques. Avec des schémas précis.  
Des secrets inabordables. En effet, 2 exemplaires du livre – non réédité – ont été proposés sur Amazon à 28 et 23 millions de dollars par profnath et bordeebook, deux vendeurs. Personne n’a estimé à ce niveau l’intérêt de connaître le jeu du complexe bithorax ni celui des gènes « engrailed ». On s’est aperçu chez Amazon de l’anomalie et le prix est retombé à une centaine de dollars. Les prix avaient explosé du fait de l’usage incontrôlé par les vendeurs d’algorithmes d’« optimisation », l’un ne disposant pas du livre mais comptant le racheter à l’autre pour le revendre à son client.
D’après, notamment, « Comment un livre sur les mouches a atteint 23 millions de dollars sur Amazon », lu le 26 avril 2011 à www.slate.fr/
NDLR 1 : au jour de rédaction de cette Épingle, sur Amazon, 7 exemplaires disponibles à 79,99 $.
NDLR 2 : l’ouvrage est en ligne, gratuitement, ici.


1001 Très très haut de gamme
Les sauterelles (Orth. Ensifères) mâles stridulent en frottant leur râpe – située sur l’élytre gauche – sur leur grattoir porté par l’élytre droit, un « miroir » amplifiant le son. La fréquence se situe entre 5 et 30 kHz.
Trois espèces d’un nouveau genre de Tettigoniidés prédateurs – baptisé Supersonus – se distinguent nettement du commun.
Ces individus, habitants de la forêt tropicale humide en Équateur et en Colombie, émettent en effet leur appel à la fréquence de 150 KHz et quelques. Et ce avec une puissance de 110 dB à 15 cm. Ils sont pourtant brachyptères, leurs élytres ne dépassant pas la surface d’un demi-millimètre carré.
Seule l’aile droite émet le signal sonore, la gauche n’y participe pas contrairement à ce qui se passe chez la plupart des Tettigoniidés. Le secret de la performance réside dans la forme concave de cette aile qui, face à une dépression du dos de l’insecte, crée une chambre d’amplification.
Incapables de voler ces Supersonus tapageurs ne devraient pas échapper aux chauves-souris. Sans doute minimisent-ils le risque en réduisant la durée des stridulations et grâce à leur « oreille » capable de repérer les signaux d’écholocation de leurs prédateurs.
Article source
À (re)lire – et écouter – la page Stridulations  


Une goutte d’insecticide peut stimuler l’odorat d’un insecte ravageur. INRA, janvier 2015.
[Agrotis ipsilon, Lép. Noctuidé]

Comment le moustique a pris goût à l’homme
, par Benjamin Prud'homme. Le Monde (abonnés), 5 janvier 2015.

La Lettre du DSF,
n° 49, décembre 2014.

Les essaims d’insectes sont-ils des systèmes critiques ?
par Maurice Mashaal. Pour la Science, 3 janvier 2015.
[R]

Les Épingles de collection - à consulter, page par page : Les Épingles entomologiques de 1999 et 2000, Les Épingles de 2001, Les Épingles de 2002,  Les Épingles de 2003, Les Épingles de 2004, Les Épingles de 2005,  Les Épingles de 2006, Les Épingles de 2007, Les Épingles de 2008,  Les Épingles de 2009, Les Épingles de 2010, Les Épingles de 2011, Les Épingles de 2012, les Épingles de 2013, les Épingles de 2014, les Épingles de 2015 - ou globalement (jusqu'à fin 2009)  ici.
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