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Les insectes de la Belle Époque

LE BRAULA CŒCA

C'est un insecte bien curieux que cette mouche minuscule, aveugle et sans ailes, qui vit en commensale sur notre abeille domestique. De très petite taille, puisqu'il ne mesure qu'un millimètre et demi, il échappe facilement à l'observation des profanes, mais les apiculteurs le connaissent bien :ils lui donnent le nom doublement impropre de pou de l'abeille, e tles naturalistes celui de Braule aveugle (Braula coeca), parce qu'il est privé d'yeux. Il appartient à l'ordre des diptères et au sous-ordre des ornithomyiens ou pupipares.

Sa couleur est brune plus ou moins fauve ; il se déplace sur le corps de son hôte avec une agilité extrême et se cramponne fortement à ses poils, se tenant de préférences sur lecorselet, vers l'écusson. Nos figures nous dispensent d'une description détaillée ; elles représentent l'insecte, d'une part, en préparation microscopique pour en faire bien voir les détails, et aussi à l'état vivant pour en montrer les allures bizarres.

Figures 1 et 2. Braula coeca sur une patte d'abeille (fortement grossi)

On rencontre des braules aveugles sur les trois sortes d'individus de la ruche : mâles, femelle, ouvrières,mais plus spécialement sur les femelles et surtout dans les colonies vieilles et désorganisées, ou logées dans de vielles bâtisses (ainsi nomme-t-on en apiculture les rayons de cire construits par les abeilles).

Ils sont plus rares dans les ruches vigoureuses qui sans doute savent s'en débarrasser, car on les trouve parfois morts, sur le plateau devant l'entrée des ruches.

Figure 3. Braula coeca en préparation microscopique grossie.
En bas, la grandeur naturelle.

M. J. Pérez a donné sur les mœurs du braule aveugle des détails extrêmement intéressants et a fait connaître le premier sa manière de manger. Il le vit campé sur le devant de la tête de l'abeille, s'y démener avec vivacité, frappant et grattant de ses pattes antérieures la base du labre, puis reculant vers l'insertion des antennes, se ruant à nouveau vers la bouche pour recommencer sa manœuvre, et s'y arrêtant enfin pour humer une gouttelette de miel dégorgées par les organes buccaux déployés un peu au dehors.

Figure 4.  - a, bouche ; b, l'un des tarses

Cette manière de vivre explique bien pourquoi les braules, séparés de leur victime, meurent rapidement. Leurs métamorphoses sont également des plus curieuses : le double oviducte de la femelle contient seulement quatre embryons qui s'y développent complètement, nourris par une glande mammaire interne, et sont expulsés ayant atteint tout leur développement. Ils ressemblent alors à une pupe, et l'éclosion de l'insecte parfait a lieu une quinzaine de jours après.

Très commun en France, en Allemagne, en Italie et dans les pays baltiques, le braule aveugle semble inconnu dans le reste de la Russie , ainsi que (d'après Langstroth)dans l'Amérique du Nord.

Les apiculteurs le considèrent comme un véritable parasite et le détruisent. On a conseillé dans ce but de saupoudrer les abeilles avec de poudre d'encens ou de placer dans la ruche des morceaux de naphtaline. Quelques bouffées de tabac leur font lâcher prise et ils tombent sur le plateau de la ruche, où il est facile de les balayer au dehors : c'est le moyen qu'on emploie le plus généralement. Il faut pourtant en user avec prudence, car le tabac ne laisse pas de présenter quelque danger pour les abeilles lorsqu'elles en respirent la fumée en trop grande quantité.

A.-L. Clément, La Nature, 2e semestre 1905, pp. 221-222

La biologie du Braule a été correctement établie dans les années 1920 : les asticots creusent des mines sous les opercules des cellules où les œufs ont été pondus.


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