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Les insectes de la Belle Époque

PROTECTION DES ANIMAUX INSECTIVORES*

Certains animaux carnassiers vivent à peu près complètement ou même complètement d'Insectes, ce sont les Insectivores proprement dits ; ils doivent être protégés sans aucune restriction. D'autres mangent encore des Insectes, mais en même temps aussi des graines, des fruits, du gibier, des Oiseaux, etc. Ils sont donc tantôt utiles, tantôt nuisibles. On doit les protéger lorsqu'ils sont trop peu nombreux pour être très nuisibles et que les Insectes qu'ils détruisent sont très abondants; on doit les combattre dans le cas contraire. On trouve des animaux à peu près uniquement insectivores, les seuls à mentionner ici, dans divers groupes zoologiques; les principaux sont :

A. MAMMIFÈRES.

1° Les Chauves-souris.

2° Les Insectivores proprement dits (Hérisson, Taupe et Musaraigne).

B. OISEAUX.

1° Des Rapaces nocturnes (Chat-huant, Effraie, Hibou). Le Grand-duc, qui détruit le gibier et les petits Oiseaux, est plus nuisible qu'utile.

2° Des Grimpeurs (Pics, Torcol et Coucou).

Des Passereaux. Ces Oiseaux comprennent la plus grande partie des Oiseaux terrestres, en particulier ceux que l'on trouve dans les jardins, dans les champs et dans les bois. Ils détruisent un nombre incalculable d'Insectes, particulièrement à l'époque des couvées. Beaucoup doivent être protégés; il n'y a de réserve à faire que pour les espèces granivores ou frugivores, qui sont utiles au printemps, au moment où elles ont des petits, et deviennent nuisibles à l'automne, au moment où elles mangent les fruits ou les graines. En outre, certaines espèces détruisent le gibier et les petits Oiseaux; elles sont nuisibles.

Les espèces purement insectivores et que l'on doit protéger avec le plus de soin sont :

Les Fissirostres (Hirondelles, Martinet, Engoulevents).

Les Ténuirostres (Huppe, Grimpereau, Sitelle).

Les Becs-fins (Fauvettes, Rouge-gorge, Rossignol, Troglodyte, Roitelets, Traquets).

Parmi les Dentirostres : les Bergeronnettes, les Gobe-Mouches, les Hochequeues et les Mésanges.

C. REPTILES ET BATRACIENS.

1° Les Sauriens (Lézards, Caméléon, Scinques, Seps et Orvet).

2° Les Crapauds.

3° Les Grenouilles.

4° Les Rainettes.

5° Les Salamandres et les Tritons.

Tous ces animaux détruisent un nombre considérable d'Insectes, de Vers et de Limaces.

D. INSECTES.

Un assez grand nombre d'Insectes ont des mœurs carnassières et sont très utiles en détruisant les Insectes nuisibles, les Vers, les Limaces et les Escargots. On peut les diviser, au point de vue pratique, en deux groupes : ceux qui saisissent directement leur proie pour la manger eux-mêmes ou pour la donner en pâture à leur progéniture, et ceux qui pondent leurs neufs sur le corps ou dans le corps de leur victime sans la manger ou l'emporter elle-même. De ces œufs sortent des larves qui pénètrent dans le corps de cette victime, y vivent en parasites internes et la dévorent peu à peu. C'est surtout chez les diverses larves et chenilles, et chez les Pucerons et les Cochenilles, que ces parasites internes sont fréquents. L'effet de cette présence est d'amener la mort des larves et des chenilles parasitées et de les empêcher, par suite, de se transformer en Insectes adultes. Sur les Pucerons et les Cochenilles, l'effet est d'empêcher ces Insectes de pondre et finalement aussi de les faire périr.

Le rôle de ces parasites internes est d'une très grande importance au point de vue de la limitation du nombre d'individus appartenant à beaucoup d'espèces nuisibles. Plus les individus appartenant à ces espèces deviennent nombreux, plus les parasites, qui trouvent par là même des conditions très favorables à leur développement, le deviennent aussi. Finalement presque tous les individus des espèces nuisibles sont parasités et celles-ci se trouvent ramenées souvent, presque subitement, à ne plus compter que très peu de représentants. A ce moment, les parasites eux-mêmes disparaissent presque complètement, faute de pouvoir pondre leurs œufs dans les conditions indispensables au développement de leurs larves. Il en résulte que les espèces nuisibles, ainsi que leurs parasites internes, sont alternativement représentés tantôt par un grand nombre d'individus, tantôt par un petit nombre. Les dégâts produits par ces espèces nuisibles subissent par suite aussi la même périodicité croissante puis décroissante.

Il convient donc de protéger, dans la mesure du possible, les Insectes dont les larves sont parasites internes des espèces nuisibles. Le plus souvent, du reste, ces Insectes sont de très petite taille, ce qui les protège tout naturellement d'une manière suffisante.

Fig. 143. - Cicindèle champêtre. Larve en embuscade; adulte.

a. Groupe des Insectes carnassiers saisissant directement leur proie.

Les Cicindélides. - Insectes très voisins des Carabides avec lesquels on les classe souvent. L'adulte chasse sa proie tandis que la larve, cachée dans un trou creusé en terre, l'attend et la saisit au passage. Exemple : la Cicindèle champêtre (Cicindela campestris) [fig. 143].

La plupart des Carabides (voir page 5). - Dans les jardins, les larves et les adultes de ces espèces rendent de très grands services ; non seulement on ne doit pas les écraser, mais il est bon de les y pporter et de leur laisser de petits tas de pierres, placés le long des murs, pour les abriter pendant le jour. Comme exemples de Carabides utiles on peut citer, parmi les plus grosses espèces :

Le Carabe doré (Carabus auratus) [fig.144]. Grand destructeur de Hannetons.

Fig. 144. - Carabe doré. Adulte et larve.

Fig. 145. - Calosome sycophante attaquant une chenille.

Les Calosomes, dont deux espèces principales : le Calosome sycophante (Ca!osonm sycophanta) [fig. 145] et le Calosome inquisiteur (C. inquisitor) détruisent un grand nombre de chenilles sur les arbres.

Le Procruste coriace (Procrustes coriaceus), qui mange des Limaces, des Chenilles, etc.

Les Staphylins (Siaphylinides). - Famille d'Insectes reconnaissables à leurs élytres très courtes, ne recouvrant qu'une petite partie du corps, et à l'habitude qu'ils ont de relever de bas en haut la partie terminale de leur corps. Les grosses espèces détruisent des Insectes et des Limaces.

La plupart des Silphes (voir page 6).

Les Vers luisants (Lampyrides) [fig. 146]. - Les larves et les adultes sont carnassiers et utiles. Ils mangent surtout des Limaces, des Escargots et des Chenilles. Les mâles seuls acquièrent des ailes et peuvent voler, tandis que les femelles restent toujours larviformes. On peut donc recueillir les larves et les femelles et les placer dans les jardins, où elles resteront. Une espèce de cette famille vit d'Escargots; c'est :

Le Drile jaunâtre (Drilus flavescens) [fig. 147]. Dans cette epèce, qui n'est pas phosphorescente, le mâle seul est aussi muni d'ailes et vole sur les buissons, tandis que la femelle, toujours larviforme,vit dans les coquilles d'Escargots dont elle mange le contenu.

Fig. 146. Vers luisants. Adultes et larves.

Fig. 147. Drile jaunâtre. Adulte (mâle et femelle).

Les Téléphorides. - Coléoptères à élytres molles, à corps allongé et à bords parallèles, communs sur les buissons, sur l'herbe et sur les arbustes. Ils détruisent beaucoup de chenilles.

Les Clérides. - Petits Coléoptères, ordinairement à vives couleurs et à corps poilu. Les larves et les adultes détruisent un grand nombre d'Insectes nuisibles.

Les Coccinelles (voir page 4o) [fig. 44].

La Mante religieuse (Mantis religiosa).

Le Grillon des champs (Gryllus campestris).

La Grande Sauterelle verte (Locusta viridissima)

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Les Libellulides. Sont carnassières à l'état larvaire et à l'état adulte.

Les Panorpides. Insectes carnassiers seulement à l'état adulte.

Fig. 148. Hémérobe ou Chrysope vulgaire. Adulte et œufs.

Fig. 149. Fourmilion commun. Larve et adulte.

Les Hémérobides. Parmi ces Insectes on peut citer, en particulier, les Hémérobes (fig. 148) et les Fourmilions (fg. 14q). Les premiers de ces insectes sont de très petite taille ; leurs larves, appelées " Lions des Pucerons ", vivent sur les arbres, les arbustes, les plantes basses, et dévorent les Pucerons, les Cochenilles, les Psylles, et aussi les petites larves et les petites chenilles. L'adulte fixe souvent ses oeufs sur les feuilles auxquelles ils sont alors attachés par un long pédoncule (fig. 148). Les larves, dès leur naissance, trouvent ainsi facilement, près d'elles, la nourriture qui leur convient.

Les Fourmilions sont de taille beaucoup plus grande et ressemblent, à l'état adulte, aux Libellules. Les larves, armées d'une forte pince, vivent aux dépens de toutes sortes d'Insectes. Dans le Fourmilion commun, la larve se tient à l'affût au fond d'un entonnoir creusé dans le sable ; dans des espèces voisines, elle guette simplement sa proie sans creuser de terrier.

Les Guêpes solitaires (voir page 46) qui portent dans leurs nids, pour nourrir leurs larves, des chenilles et larves préalablement piquées mais non tuées. Les larves de ces Guêpes ont ainsi à leur disposition des proies vivantes et incapables de leur résister.

Les Guêpes fouisseuses (Sphégides), qui ont des moeurs analogues.

Les Asiles. - L'adulte chasse et mange }toutes sortes d'Insectes. Il y en a plusieurs espèces; la principale est l'Asile frelon, qui ressemble à une Guêpe.

Les Volucelles. - Les larves habitent les nids de Guêpes et en mangent les larves. L'adulte a l'aspect des Hyménoptères et peut, grâce à cette ressemblance, aller pondre ses œufs dans le nid de ces Insectes.

Les Syrphes. - Les larves, qui ont l'aspect de petites Sangsues, se trouvent au milieu des Pucerons qu'elles mangent en grand nombre. Elles sont vertes ou grises. Quand elles ont atteint leur complet développement elles se transforment, sur les plantes mêmes où elles vivaient, en une nymphe piriforme d'où l'adulte sort peu après. Celui-ci va pondre ses oeufs sur les plantes ayant des Pucerons ; on le reconnaît à la façon qu'il a de voler; il s'arrête fréquemment en volant sur place très rapidement, au voisinage des végétaux où il cherche à pondre. Il y en a de nombreuses espèces rendant les plus grands services.

Fig. 150.- Anomalon circonflexe.

Fig. 151. - Rhyssa persuasive.

Fig. 152 - Microgaster des bois. Adulte et cocons de la nymphe placés sur le cadavre de la Chenille que les larves ont mangée.

b. Groupe des Insectes pondant sur ou dans le corps des Insectes qu'ils détruisent.

La femelle est munie d'une tarière plus ou moins longue, souvent visible à l'extrémité postérieure du corps et qui permet de la reconnaître facilement. Avec cette tarière elle perce les larves ou les chenilles et pond ses neufs dans l'intérieur de leur corps; elle sait aller les atteindre même sous les écorces d'arbres ou dans les trous où elles sont cachées. Les larves parasites, dès leur sortie de l'œuf, rongent intérieurement leur hôte mais sans le tuer immédiatement. Elles sortent pour se nymphoser ou même se nymphosent sur place. Ces Hyménoptères courent très vite et agitent leurs antennes très vivement; on les rencontre sur les murs, les troncs d'arbres, les buissons, les fleurs, etc. La plupart des espèces sont très petites et sont suffisamment protégées ; les grandes espèces doivent être respectées et non détruites. Les principales familles de ces Hyménoptères utiles sont :

Les Ichneumonides. - Famille renfermant de très nombreuses espèces, dont quelques-unes de grande taille. Les antennes et l'abdomen soit ordinairement très longs; ce dernier est souvent comprimé latéralement ou au contraire aplati. Il y a une tarière courte ou parfois très longue. Les Insectes de cette famille rendent de très grands services; ils détruisent surtout les larves de Bombycides, de Tenthrèdes et de Sirex. Exemples : la Rhyssa persuasive (Rhyssa persuasoria) [fig. 151] et l'Anomalon circonflexe (Anomalon circumflexum) [fig. 15o]. La première de ces deux espèces est brune avec des taches jaunes; elle possède une tarière trois fois plus longue que son corps, grâce à laquelle la femelle peut percer l'écorce et le tronc des arbres pour aller placer ses oeufs dans les larves qui s'y trouvent. La seconde espèce pond de même ses oeufs dans la chenille du Bombyx du Pin.

Les Braconides. - Famille contenant des espèces de petite taille (souvent de 2 ou 3 millimètres) mais détruisant beaucoup de Chenilles et de Pucerons. Exemple :  le Microgaster des bois (Microgaster nemorum) [fig. 152]. Cette espèce, de couleur noire, avec les pattes en partie jaune rougeâtre, pond particulièrement dans les chenilles du Bombyx du Pin. Ses larves sortent de la chenille après s'être nourries à ses dépens et se filent un cocon blanc dans lequel elles se nymphosent ensuite. On trouve alors, agglomérés sur le corps même de la chenille, tous les petits cocons d'où s'envoleront plus tard les Microgasters adultes.

À cette famille appartiennent aussi les Aphidius qui parasitent les Pucerons.

Fig. 153. - Ptéromale des chrysalides.

Les Chalcidiens. - Les espèces de cette famille sont également de très petite taille, mais parasitent et tuent de nombreuses larves, chenilles, Pucerons, Cochenilles, etc.. Comme exemple, on peut citer le Ptéromale des chrysalides (Pteromalus puparum) [fig. 153] dont la larve vit dans les chrysalides de certains Papillons diurnes tels que les Piérides. Les neufs sont pondus dans le corps de la Chenille prête à se chrysalider. Quand les larves sont arrivées à leur grosseur définitive, elles se nymphosent sur place et l'adulte sort en perçant la paroi du corps de la chrysalide parasitée et tuée.

Les Proctotrupides. Petits Hyménoptères noirs, voisins des précédents, mais moins actifs qu'eux. Ils pondent ordinairement leurs œufs dans ceux des Insectes qu'ils parasitent, particulièrement dans ceux des Bombycides. Par suite, il sort des œufs parasités, non une chenille de Bombyx, mais des Proctotrupides adultes.

Certains Cynipides (voir page 48).

Les Diptères dont les larves vivent en parasites internes pondent sur le corps des chenilles, des larves et peut-être des adultes qu'ils parasitent; leurs larves pénètrent dans le corps de ceux-ci et le dévorent peu à peu. Elles se transforment sur place ou, le plus souvent, en sortant à l'extérieur.

Les principaux sont :

Les Conops, qui parasitent les Guêpes.

Les Tachinaires, qui parasitent un grand nombre de chenilles. Elles comprennent de nombreuses espèces dont les unes de petite taille et les autres beaucoup plus grosses.

E. MYRIAPODES.

Beaucoup de Myriapodes, surtout ceux qui appartiennent à l'ordre des Chilopodes, animaux caractérisés par la présence d'une seule paire de pattes par anneau, vivent d'Insectes et sont utiles. Les principaux sont

Les Lithobies. (Abondent sous les pierres et les écorces d'arbres). - L'espèce la plus commune est la Lithobie à tenailles (Lithobius forficatus); elle est de couleur brun roussâtre.

Les Scutigères. L'espèce principale ou Scutigère commune (Scutigera coleoptrata) est munie de longues pattes grêles et fragiles qui lui donnent un peu l'aspect d'une Araignée.

Les Cryptops. Plusieurs espèces, parmi lesquelles le Cryptops des jardins (Cryptops hortensis) sont très communes sous les feuilles, la mousse, dans les jardins et les bois.

La Scolopendre. (Détruit beaucoup d'Insectes et de Limaces).

F. ARACHNIDES.

Les Scorpions. - Les deux espèces communes dans le midi de la France, sont exclusivement insectivores ce sont le Scorpion commun et le Scorpion européen qui mesurent, celui-ci de 8 à g centimètres de long et celui-là seulement de 3 à 4 centimètres. Le "dard à venin" qui termine leur abdomen peut causer une douleur assez vive à la suite de ses piqûres. Chez le Scorpion commun cette piqûre est toujours peu grave et même chez le Scorpion européen elle n'est jamais très dangereuse.

Les Araignées proprement dites. - Toutes les espèces sont inoffensives et exclusivement insectivores. Les unes chassent directement les Insectes, les autres les prennent dans les toiles qu'elles tissent, ou les surprennent quand ils passent à proximité de leurs cachettes.

Les Faux Scorpions (Pseudo Scorpionides). - Espèces de très petite taille, qui ont reçu leur nom à cause de la présence, en arrière des chelicères, d'une paire d'appendices terminés chacun par une pince préhensile, ce qui les fait ressembler un peu aux Scorpions. Elles n'ont pas de "dard venimeux,, et sont complètement inoffensives. Elles se tiennent surtout sous les écorces des arbres et font la chasse aux Insectes qui s'y trouvent en abondance.

Les Faucheurs (Phalangides). - Animaux détruisant aussi les Insectes. L'espèce la plus commune est le Faucheur commun (Phalangium opilio).

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In Lécaillon M.A., 1903. Insectes et autres invertébrés nuisibles aux plantes cultivées et aux animaux domestiques. Min. Agriculture, Paris, 153-159.

(*) Les principaux animaux insectivores sont, pour la plupart, simplement mentionnés dans ce chapitre.


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